dimanche 28 avril 2013

La Vierge Marie nous enseigne ce que signifie vivre dans l'Esprit Saint

Paroles du pape avant le Regina Coeli.

Avant de conclure cette célébration, je voudrais confier à la Vierge les confirmands ainsi que vous tous. La Vierge Marie nous enseigne ce que signifie vivre dans l’Esprit-Saint et ce que signifie accueillir la nouveauté de Dieu dans notre vie. Elle a conçu Jésus par l’opération de l’Esprit, et chaque chrétien, chacun de nous, est appelé à accueillir la Parole de Dieu, à accueillir Jésus en soi et à le porter à tous. Marie a invoqué l’Esprit avec les Apôtres au cénacle : nous aussi, chaque fois que nous nous réunissons en prière, nous sommes soutenus par la présence spirituelle de la Mère de Jésus, pour recevoir le don de l’Esprit et avoir la force de témoigner Jésus ressuscité. Je vous dis cela de façon particulière à vous, qui aujourd’hui avez reçu la confirmation : que Marie vous aide à être attentifs à ce que le Seigneur vous demande, et à vivre et cheminer toujours selon l’Esprit Saint !

Le courage d'aller à contre-courant

Homélie du Pape François, prononcée place Saint Pierre lors de la messe du 5e dimanche de Pâques au cours de laquelle 44 jeunes choisis de diocèses représentant les cinq continents ont été confirmés. 


Chers frères et sœurs ! Très chers confirmands ! Bienvenue !

Je voudrais vous proposer trois pensées simples et brèves sur lesquelles réfléchir.

1. Dans la deuxième lecture nous avons entendu la belle vision de saint Jean : un ciel nouveau et une terre nouvelle et puis la Cité Sainte qui descend d’auprès de Dieu. Tout est nouveau, transformé en bien, en beauté, en vérité ; il n’y a plus de plainte, de deuil… Cela c’est l’action de l’Esprit Saint : il nous apporte la nouveauté de Dieu ; il vient à nous et fait toutes choses nouvelles, il nous change. L’Esprit nous change ! Et la vision de saint Jean nous rappelle que nous sommes tous en marche vers la Jérusalem du ciel, la nouveauté définitive pour nous et pour toute la réalité, l’heureux jour où nous pourrons voir le visage du Seigneur, - ce visage merveilleux, si beau du Seigneur Jésus - où nous pourrons être avec lui pour toujours, dans son amour.

Voyez, la nouveauté de Dieu ne ressemble pas aux nouveautés mondaines, qui sont toutes provisoires, elles passent et on en recherche toujours plus. La nouveauté que Dieu donne à notre vie est définitive, et pas seulement dans l’avenir, quand nous serons avec lui, mais aussi aujourd’hui : Dieu est en train de tout faire nouveau, l’Esprit Saint nous transforme vraiment et veut transformer, à travers nous aussi, le monde dans lequel nous vivons. Ouvrons la porte à l’Esprit, laissons nous guider par lui, laissons l’action continue de Dieu faire de nous des hommes et des femmes nouveaux, animés par l’amour de Dieu, que l’Esprit Saint nous donne! Qu’il serait beau si chacun de vous, le soir pouvait dire : aujourd’hui à l’école, à la maison, au travail, guidé par Dieu, j’ai accompli un geste d’amour envers mon camarade, mes parents, une personne âgée ! Que c’est beau !

2. Une deuxième pensée : dans la première lecture Paul et Barnabé affirment qu’ « il nous faut passer par bien des épreuves pour entrer dans le royaume de Dieu » (Ac 14, 22). Le chemin de l’Église, de même que notre chemin chrétien personnel, ne sont pas toujours faciles, ils rencontrent la difficulté, l’épreuve. Suivre le Seigneur, laisser son Esprit transformer nos zones d’ombre, nos comportements qui ne sont pas selon Dieu et laver nos péchés, c’est un chemin qui rencontre de nombreux obstacles, en dehors de nous, dans le monde, et aussi en nous, dans le cœur. Mais les difficultés, les épreuves, font partie de la route pour parvenir à la gloire de Dieu, comme pour Jésus, qui a été glorifié sur la Croix ; nous les rencontrerons toujours dans la vie ! Ne pas se décourager ! Nous avons la force de l’Esprit Saint pour vaincre ces épreuves.

3. Et j’en viens au dernier point. C’est une invitation que je vous adresse à vous confirmands et à tous : demeurez solides sur le chemin de la foi avec une ferme espérance dans le Seigneur. Là se trouve le secret de notre chemin ! Lui nous donne le courage d’aller à contre-courant. Écoutez bien, les jeunes : aller à contre-courant ; cela fait du bien au cœur, mais il nous faut du courage pour aller à contre-courant et lui nous donne ce courage ! Il n’y a pas de difficultés, d’épreuves, d’incompréhensions qui doivent nous faire peur si nous demeurons unis à Dieu comme les sarments sont unis à la vigne, si nous ne perdons pas l’amitié avec lui, si nous lui faisons toujours plus de place dans notre vie. Ceci aussi et surtout si nous nous sentons pauvres, faibles, pécheurs, parce que Dieu donne force à notre faiblesse, richesse à notre pauvreté, conversion et pardon à notre péché. Il est si miséricordieux le Seigneur : si nous allons à lui, il nous pardonne toujours. Ayons confiance dans l’action de Dieu ! Avec lui nous pouvons faire de grandes choses ; il nous fera sentir la joie d’être ses disciples, ses témoins. Misez sur les grands idéaux, sur les grandes choses. Nous chrétiens nous ne sommes pas choisis par le Seigneur pour de petites bricoles, allez toujours au-delà, vers les grandes choses. Jeunes, jouez votre vie pour de grands idéaux!

Nouveauté de Dieu, épreuve dans la vie, solides dans le Seigneur. Chers amis, ouvrons grande la porte de notre vie à la nouveauté de Dieu que nous donne l’Esprit Saint, pour qu’il nous transforme, nous rende forts dans les épreuves, renforce notre union avec le Seigneur, nous fasse demeurer solides en lui : c’est une vraie joie ! Qu’il en soit ainsi !

Confirmations 2013

mercredi 24 avril 2013

Le jugement dernier doit nous pousser à mieux vivre le présent

Audience Générale du Pape François.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans le Credo, nous professons que Jésus « reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts ». L’histoire humaine commence avec la Création de l’homme et de la femme à l’image et à la ressemblance de Dieu, et se termine par le jugement dernier du Christ. Nous oublions souvent ces deux pôles de l’histoire et surtout, parfois, la foi dans le retour du Christ et dans le jugement dernier n’est pas tellement claire ni solide dans le cœur des chrétiens. Durant sa vie publique, Jésus s’est souvent arrêté sur la réalité de sa venue ultime. Aujourd’hui, je voudrais réfléchir sur trois textes d’Évangile qui nous aident à entrer dans ce mystère : celui des dix vierges, celui des talents et celui du jugement dernier. Ils font tous les trois partie du discours de Jésus sur la fin des temps, dans l’Évangile de Matthieu.

Souvenons-nous, avant tout, que, avec l’Ascension, le Fils de Dieu a apporté auprès du Père notre humanité qu’il a assumée, et qu’il veut nous attirer tous à lui, appeler le monde entier à être accueilli dans les bras ouverts de Dieu afin que la réalité tout entière soit remise au Père, à la fin de l’histoire.

Mais il y a ce « temps immédiat », entre la première venue du Christ et la dernière, qui est précisément le temps que nous sommes en train de vivre. C’est dans ce contexte du « temps immédiat » que se situe la parabole des dix vierges (cf. Mt 25, 1-13). Il s’agit de dix jeunes filles qui attendent l’arrivée de l’Époux, mais celui-ci tarde et elles s’endorment. Quand soudain on annonce que l’Époux arrive, elles se préparent toutes à l’accueillir, mais alors que cinq d’entre elles, les vierges sages, ont de l’huile pour alimenter leurs lampes, les autres, les vierges folles, se retrouvent avec leurs lampes éteintes parce qu’elles n’ont pas d’huile ; et pendant qu’elles vont en chercher, l’Époux arrive et les vierges folles trouvent fermée la porte qui introduit à la fête nuptiale. Elles frappent avec insistance, mais il est désormais trop tard ; l’Époux répond : je ne vous connais pas. L’Époux est le Seigneur, et ce temps d’attente de son arrivée est le temps qu’il nous donne, à nous tous dans sa miséricorde et sa patience, avant sa venue finale ; c’est un temps de vigilance, le temps pendant lequel nous devons garder allumées les lampes de la foi, de l’espérance et de la charité, pendant lequel nous devons garder le cœur ouvert au bien, à la beauté et à la vérité, un temps à vivre selon Dieu, puisque nous ne connaissons ni le jour, ni l’heure du retour du Christ. Ce qui nous est demandé, c’est d’être préparés pour la rencontre – préparés à une rencontre, à une belle rencontre, la rencontre avec Jésus –, ce qui signifie savoir voir les signes de sa présence, garder notre foi vivante, par la prière, les sacrements, être vigilants pour ne pas nous endormir, pour ne pas oublier Dieu. La vie des chrétiens endormis est une vie triste, ce n’est pas une vie heureuse. Le chrétien doit être heureux, de la joie de Jésus. Ne nous endormons pas !

La seconde parabole, celles des talents, nous fait réfléchir sur le rapport entre la manière dont nous employons les dons reçus de Dieu et son retour, lorsqu’il nous demandera comment nous les avons utilisés (cf. Mt 25, 14-30). Nous connaissons bien cette parabole : avant son départ, le maître de maison confie à chacun de ses serviteurs plusieurs talents, pour qu’ils soient bien utilisés en son absence. Il en confie cinq au premier, deux au second et un au troisième. Pendant son absence, les deux premiers serviteurs multiplient leurs talents – ce sont d’anciennes pièces de monnaie – alors que le troisième préfère enterrer le sien et le remettre intact au maître de maison. À son retour, le maître juge leurs actes : il loue les deux premiers, alors que le troisième est chassé dehors, dans les ténèbres, parce qu’il a gardé caché son talent, par peur, se renfermant sur lui-même. Un chrétien qui se replie sur lui-même, qui cache tout ce que le Seigneur lui a donné,… n’est pas chrétien ! C’est un chrétien qui ne remercie pas Dieu pour tout ce qu’il lui a donné ! Cette parabole nous dit que l’attente du retour du Seigneur est le temps de l’action, – nous sommes dans le temps de l’action – le temps pour faire fructifier les dons de Dieu, non pas pour nous-mêmes mais pour lui, pour l’Église, pour les autres, le temps de chercher sans cesse à faire grandir le bien dans le monde. Et en particulier aujourd’hui, en cette période de crise, il est important de ne pas se replier sur soi en enterrant ses talents, ses richesses spirituelles, intellectuelles, matérielles, tout ce quel le Seigneur nous a donné, mais de s’ouvrir, d’être solidaires, d’être attentifs à l’autre.

Sur la place, aujourd’hui, j’ai vu qu’il y a de nombreux jeunes c’est vrai, ça ? Il y a beaucoup de jeunes ? Où sont-ils ? A vous, qui êtes au début du chemin de votre vie, je vous demande : Avez-vous pensé aux talents que Dieu vous a donnés ? Avez-vous pensé à la manière dont vous pouvez les mettre au service des autres ? N’enterrez pas vos talents ! Misez sur de grands idéaux, ces idéaux qui élargissent le cœur, ces idéaux de service qui rendront vos talents féconds. La vie ne nous est pas donnée pour que nous la conservions jalousement pour nous-mêmes, mais elle nous est donnée pour que nous la donnions. Chers jeunes, ayez un cœur généreux ! N’ayez pas peur de rêver de grandes choses !

Enfin, un mot sur le passage du jugement dernier, qui décrit la seconde venue du Seigneur, lorsqu’il jugera tous les êtres humains, les vivants et les morts (cf. Mt 25, 31-46). L’image utilisée par l’évangéliste est celle du berger qui sépare les brebis des boucs. Ceux qui ont agi selon la volonté de Dieu, en secourant leur prochain qui avait faim, qui avait soif, qui était étranger, nu, malade, en prison, seront mis à droite – j’ai dit « étranger » : je pense à tous ces étrangers qui sont ici, dans le diocèse de Rome ; que faisons-nous pour eux ? – ; mais ceux qui n’ont pas secouru leur prochain iront à gauche. Cette parabole nous dit que nous serons jugés par Dieu sur la charité, sur la manière dont nous aurons aimé nos frères, en particulier les plus faibles et les plus démunis. Bien sûr, nous devons toujours bien garder à l’esprit que nous sommes justifiés, nous sommes sauvés par grâce, par un acte d’amour gratuit de Dieu qui nous précède toujours ; seuls, nous ne pouvons rien faire. La foi est avant tout un don que nous avons reçu. Mais pour porter du fruit, la grâce de Dieu exige toujours que nous nous ouvrions à lui, elle nécessite notre réponse libre et concrète. Le Christ vient nous apporter la miséricorde de Dieu qui sauve. Ce qui nous est demandé, c’est de nous confier en lui, de correspondre au don de son amour par une vie bonne, faite d’actions animées par la foi et par l’amour.

Chers frères et sœurs, regarder le jugement dernier ne doit jamais nous faire peur ; cela doit plutôt nous pousser à mieux vivre le présent. Dans sa miséricorde et sa patience, Dieu nous offre ce temps afin que nous apprenions chaque jour à le reconnaître dans les pauvres et dans les petits, que nous nous attachions à faire le bien et que nous soyons vigilants dans la prière et dans l’amour. Que le Seigneur, à la fin de notre existence et de l’histoire, puisse nous reconnaître comme des serviteurs bons et fidèles. Merci !

dimanche 21 avril 2013

Le mystère de la vocation

Paroles du pape François avant le Regina Coeli.

Chers frères et soeurs,

Le IVe dimanche du Temps pascal est caractérisé par l’Evangile du Bon Pasteur – du chapitre 10 de saint Jean – qu’on lit chaque année. Le passage d’aujourd’hui rapporte ces paroles de Jésus : « Mes brebis écoutent ma voix et moi je les connais et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle et elles ne seront pas perdues et personne ne les arrachera de ma main. Mon Père, qui me les a données, est plus grand de tous et personne ne peut les arracher de la main de mon Père. Moi et le Père nous sommes un » (10, 27-30).

Ces quatre versets renferment le message de Jésus, le noyau central de son Evangile : Il nous appelle à participer à sa relation avec le Père, et c’est cela la vie éternelle. Jésus veut établir avec ses amis une relation qui soit le reflet de celle qu’Il a avec le Père : une relation d’appartenance réciproque en pleine confiance, dans une intime communion.

Pour exprimer cette entente profonde, ce rapport d’amitié, Jésus utilise l’image du pasteur et de ses brebis : Il les appelle et elles reconnaissent sa voix, elles répondent à son appel et elles le suivent. Elle est très belle, cette parabole ! Le mystère de la voix est suggestif : dès le sein de notre mère nous apprenons à reconnaître sa voix et celle de notre papa ; le ton d’une voix nous fait percevoir l’amour ou le mépris, l’affection ou la froideur.  La voix de Jésus est unique ! Si l’on apprend à la distinguer, Il nous guide sur la voie de la vie, une voie qui dépasse même l’abîme de la mort.

Mais à un moment, Jésus dit, à propos de ses brebis: “C’est mon Père qui me les a données” (Jn 10, 29). C’est très important, c’est un mystère profond, qui n’est pas facile à comprendre : si je me sens attiré par Jésus, si sa voix réchauffe mon coeur, c’est grâce à Dieu le Père, qui a mis en moi le désir de l’amour, de la vérité, de la vie, de la beauté… et Jésus est tout cela en plénitude! Cela nous aide à comprendre le mystère de la vocation, spécialement des appels à une consécration spéciale.

Parfois, Jésus nous appelle, nous invite à le suivre, mais il peut arriver que nous ne nous rendions pas compte que c’est lui, comme c’est arrivé au jeune Samuel. Il y a beaucoup de jeunes aujourd’hui ici, sur la place. Je voudrais vous demander : vous avez parfois entendu la voix du Seigneur qui, grâce à un désir, une inquiétude, vous invitait à le suivre de plus près ? Vous avez eu envie d’être les apôtres de Jésus ? La jeunesse, il faut la mettre en jeu pour de grands idéaux. Demande à Jésus ce qu’il veut faire de toi et sois courageux !

Derrière toute vocation au sacerdoce ou à la vie consacrée et avant elle, il y a toujours la prière forte et intense de quelqu’un : d’une grand-mère, d’un grand-père, d’une mère, d’un père, d’une communauté… Voilà pourquoi Jésus a dit : « Priez le maître de la moisson – c’est-à-dire Dieu le Père – d’envoyer des ouvriers à sa moisson ! » (Mt 9,38).

Les vocations naissent dans la prière et de la prière ; et elle ne peut persévérer et porter du fruit que dans la prière. J’aime à le souligner aujourd’hui, en la « Journée mondiale de prière pour les vocations ». Prions en particulier pour les nouveaux prêtres du diocèse de Rome que j’ai eu la joie d’ordonner ce matin. Et invoquons l’intercession de Marie qui est la Femme du « Oui ». Elle a appris à connaître Jésus à partir du moment où elle l’a porté en son sein. Que Marie nous aide à connaître toujours mieux la voix de Jésus et à la suivre, pour marcher sur le chemin de la vie !

Configurés au Christ, Prêtre éternel et souverain

Homélie du Pape François prononcée à l'occasion des ordinations sacerdotales célébrées en ce 4e dimanche de Pâques.

Chers frères et sœurs,

Nos frères et fils que voici, ont été appelés à l’ordre du presbytérat. Réfléchissons attentivement sur le ministère auquel ils seront élevés dans l’Église. Comme vous le savez bien le Seigneur Jésus est l’unique Souverain Prêtre du Nouveau Testament, mais en lui, c’est  aussi le saint peuple de Dieu tout entier qui a été constitué peuple sacerdotal. Néanmoins, parmi tous ses disciples, le Seigneur Jésus veut choisir certains particulièrement, afin qu’en exerçant publiquement dans l’Église, en son nom, la fonction sacerdotale pour tous les hommes, ils continuent sa propre mission de maître, prêtre et pasteur.

En effet, de même qu’il avait été envoyé par le Père pour cela, de même il envoya à son tour dans le monde d’abord les Apôtres et ensuite les Évêques et leurs successeurs, auxquels furent donnés enfin comme collaborateurs les prêtres, qui, associés à eux dans le ministère sacerdotal, sont appelés au service du Peuple de Dieu.

Après une réflexion mûre et avoir prié, nous élevons maintenant à l’ordre des prêtres nos frères que voici, pour qu’en servant le Christ, Maître, Prêtre et Pasteur, ils coopèrent à édifier du Corps du Christ qui est l’Église, en Peuple de Dieu et en Temple saint de l’Esprit-Saint.

Ils seront, en effet, configurés au Christ, Prêtre souverain et éternel, c’est-à-dire qu’ils seront consacrés comme vrais prêtres du Nouveau Testament, et à ce titre, qui les unit dans le sacerdoce à leur Évêque, ils seront des prédicateurs de l’Évangile, des pasteurs du Peuple de Dieu et ils présideront aux actions de culte, particulièrement dans la célébration du sacrifice du Seigneur.

Quant à vous, frères et fils bien-aimés, qui allez entrer dans l’ordre des prêtres, considérez qu’en exerçant le ministère de la Sainte Doctrine, vous participerez à la mission du Christ, l’unique Maître. Communiquez à tous cette Parole de Dieu, que vous-mêmes vous avez reçue avec joie. Souvenez-vous de vos mères, de vos grand-mères, de vos catéchistes, qui vous ont donné la Parole de Dieu, la foi … le don de la foi ! Ils vous ont transmis ce don de la foi. Lisez et méditez assidûment la Parole du Seigneur pour croire ce que vous lisez, enseigner ce que vous avez appris dans la foi, vivre ce que vous avez enseigné. Rappelez-vous aussi que vous n’êtes pas propriétaires de la Parole de Dieu : c’est la Parole de Dieu. Et l’Église est la gardienne de la Parole de Dieu.

Que votre enseignement soit une nourriture pour le Peuple de Dieu, le parfum de votre vie joie et soutien des fidèles du Christ, afin que, par la parole et l’exemple, vous construisiez la maison de Dieu, qui est l’Église. Vous continuerez l’œuvre de sanctification du Christ. Par votre ministère le sacrifice spirituel des fidèles est rendu parfait, car uni au sacrifice du Christ, qui, par vos mains, sera offert sacramentalement, au nom de toute l’Église, sur l’autel dans la célébration des Mystères sacrés.

Ayez conscience de ce que vous faites ; conformez votre vie à ce que vous célébrez, afin qu’en participant au ministère de la mort et de la résurrection du Seigneur, vous portiez la mort du Christ dans vos membres et marchiez avec lui dans une vie nouvelle.

Vous allez faire entrer de nouveaux fidèles dans le Peuple de Dieu par le baptême. Vous remettrez les péchés, par le sacrement de la pénitence, au nom du Christ et de l’Église. Et aujourd’hui, je vous le demande au nom du Christ et de l’Église : s’il vous plaît, soyez sans cesse miséricordieux. Par l’onction d’huile sainte vous fortifierez les malades ainsi que les personnes âgées : n’ayez pas honte d’avoir de la tendresse pour les personnes âgées. En célébrant les actions liturgiques et en offrant au long du jour la prière de louange et de supplication, vous vous ferez la voix du Peuple de Dieu et de l’humanité entière.

Conscients d’avoir été choisis parmi les hommes et constitués en leur faveur pour vous occuper des choses de Dieu, exercez avec joie et charité sincère l’œuvre sacerdotale du Christ, seulement pour plaire à Dieu et non pas à vous-mêmes. Vous êtes des pasteurs, pas des fonctionnaires. Des médiateurs, pas des intermédiaires.

Enfin, en participant à la charge du Christ, Chef et Pasteur, en communion filiale avec votre évêque, appliquez-vous à unir les fidèles dans une unique famille pour les conduire à Dieu le Père, par Jésus Christ et dans l’Esprit Saint. Ayez toujours sous les yeux l’exemple du Bon Pasteur qui n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et pour chercher et mener au salut ce qui était perdu.

Ordinations sacerdotales 2013

mercredi 17 avril 2013

Jésus-Christ, notre avocat

Audience Générale du Pape François.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans le Credo, nous trouvons l’affirmation que Jésus « est monté au ciel, il est assis à la droite du Père ». La vie terrestre de Jésus atteint son sommet lors de l’événement de l’Ascension, c’est-à-dire quand il passe de ce monde au Père et est élevé à sa droite. Quelle est la signification de cet événement ? Quelles en sont les conséquences pour notre vie ? Que signifie contempler Jésus assis à la droite du Père ? A ce propos, laissons-nous guider par l’évangéliste Luc.

Partons du moment où Jésus décide d’entreprendre son dernier pèlerinage à Jérusalem. Saint Luc remarque : « Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem » (Lc 9, 51). Alors qu’il « monte » vers la ville sainte, où s’accomplira son « exode » de cette vie, Jésus voit déjà l’objectif, le Ciel, mais il sait bien que la voie qui le ramène à la gloire du Père passe à travers la Croix, à travers l’obéissance au dessein divin d’amour pour l’humanité. Le Catéchisme de l’Église catholique affirme que « l’élévation sur la croix signifie et annonce l’élévation de l’Ascension au ciel » (n. 661). Nous aussi, nous devons avoir clairement à l’esprit que, dans notre vie chrétienne, entrer dans la gloire de Dieu exige la fidélité quotidienne à sa volonté, même quand elle demande un sacrifice, quand elle demande parfois de changer nos programmes. L’Ascension de Jésus eut lieu concrètement sur le Mont des Oliviers, près du lieu où il s’était retiré en prière avant la Passion pour rester en profonde union avec le Père : encore une fois, nous voyons que la prière nous donne la grâce de vivre fidèles au projet de Dieu.

À la fin de son Évangile, saint Luc rapporte l’événement de l’Ascension de manière très synthétique. Jésus conduisit les disciples « jusque vers Béthanie et, levant les mains, il les bénit. Tandis qu’il les bénissait, il se sépara d’eux et fut emporté au ciel. Ils se prosternèrent devant lui, puis ils retournèrent à Jérusalem, remplis de joie. Et ils étaient sans cesse dans le Temple à bénir Dieu » (24, 50-53) ; ainsi parle saint Luc. Je voudrais remarquer deux éléments du récit. Tout d’abord, au cours de l’Ascension, Jésus accomplit le geste sacerdotal de la bénédiction et les disciples expriment sûrement leur foi par la prosternation, ils s’agenouillent en baissant la tête. Cela est un premier point important : Jésus est le prêtre unique et éternel qui avec sa Passion est passé par la mort et le sépulcre, qui est ressuscité et qui est monté au Ciel ; il est auprès de Dieu le Père, où il intercède pour toujours en notre faveur (cf. He 9, 24). Comme l’affirme Jean dans sa Première Lettre, Il est notre avocat : qu’il est beau d’entendre cela ! Quand quelqu’un est appelé chez le juge ou passe en procès, la première chose qu’il fait est de chercher un avocat pour qu’il le défende. Nous, nous en avons un qui nous défend toujours, il nous défend des menaces du diable, il nous défend de nous-mêmes, de nos péchés ! Très chers frères et sœurs, nous avons cet avocat : n’ayons pas peur d’aller à Lui pour demander pardon, pour demander sa bénédiction, pour demander miséricorde ! Il nous pardonne toujours, il est notre avocat : il nous défend toujours ! N’oubliez pas cela ! L’ascension de Jésus au Ciel nous fait alors connaître cette réalité si réconfortante pour notre chemin: dans le Christ, vrai Dieu et vrai homme, notre humanité a été conduite auprès de Dieu ; Il nous a ouvert le passage ; Il est comme un chef de cordée quand on escalade une montagne, qui est arrivé au sommet et qui nous guide à Lui en nous conduisant à Dieu. Si nous lui confions notre vie, si nous nous laissons guider par Lui nous sommes certains d’être entre des mains sûres, entre les mains de notre sauveur, de notre avocat.

Un deuxième élément : saint Luc rapporte que les Apôtres, après avoir vu Jésus monter au ciel, rentrèrent à Jérusalem « avec une grande joie ». Cela nous semble un peu étrange. En général, quand nous sommes séparés de nos parents, de nos amis, pour un départ définitif et surtout à cause de la mort, il y a en nous une tristesse naturelle, parce que nous ne verrons plus leur visage, nous n’entendrons plus leur voix, nous ne pourrons plus jouir de leur affection, de leur présence. En revanche, l’évangéliste souligne la profonde joie des apôtres. Mais pourquoi ? Justement parce que, avec le regard de la foi, ils comprennent que, bien que soustrait à leurs yeux, Jésus reste pour toujours avec eux, il ne les abandonne pas et, dans la gloire du Père, il les soutient, les conduit et intercède pour eux.

Saint Luc raconte l’événement de l’Ascension également au début des Actes des apôtres, pour souligner que ce fait est comme l’anneau qui rattache et relie la vie terrestre de Jésus à celle de l’Église. Ici, saint Luc évoque aussi la nuée qui soustrait Jésus à la vue des disciples, qui restent à contempler le Christ pendant son ascension vers Dieu (cf. Ac 1, 9-10). Deux hommes vêtus de blancs interviennent alors et les invitent à ne pas rester immobiles à regarder le ciel, mais à nourrir leur vie et leur témoignage de la certitude que Jésus reviendra de la même manière qu’ils l’ont vu monter au ciel (cf. Ac 1, 10-11). C’est précisément l’invitation à partir de la contemplation de la Seigneurie du Christ, pour avoir de Lui la force de porter et de témoigner l’Évangile dans la vie de tous les jours : contempler et agir, ora et labora enseigne saint Benoît, sont tous deux nécessaires à notre vie de chrétiens.

Chers frères et sœurs, l’Ascension n’indique pas l’absence de Jésus, mais nous dit qu’il est vivant au milieu de nous de manière nouvelle ; il n’est plus dans un lieu précis du monde comme il l’était avant l’Ascension ; à présent, il est dans la Seigneurie de Dieu, présent en tout lieu et en tout temps, proche de chacun de nous. Dans notre vie, nous ne sommes jamais seuls : nous avons cet avocat qui nous attend, qui nous défend. Nous ne sommes jamais seuls : le Seigneur crucifié et ressuscité nous guide ; avec nous, il y a beaucoup de frères et sœurs qui, dans le silence et dans l’anonymat, dans leur vie de famille et de travail, dans leurs problèmes et difficultés, dans leurs joies et espérances, vivent quotidiennement la foi et apportent, avec nous, au monde la Seigneurie de l’amour de Dieu, en Jésus Christ ressuscité, monté au Ciel, avocat de notre cause. Merci.

dimanche 14 avril 2013

La foi naît de l'écoute et se raffermit dans l'annonce

Homélie du Pape François prononcée lors de la prise de possession de la Basilique Saint-Paul-hors-les-murs.


Chers frères et sœurs !

C’est une joie pour moi de célébrer l’Eucharistie avec vous dans cette Basilique [...]. Nous sommes sur la tombe de Saint Paul, un humble et grand Apôtre du Seigneur, qui l’a annoncé par la parole, lui a rendu témoignage par le martyre et l’a adoré de tout son cœur. Voilà justement les trois verbes sur lesquels je voudrais réfléchir à la lumière de la Parole de Dieu que nous avons écoutée : annoncer, témoigner, adorer.

1. Dans la première lecture, la force de Pierre et des autres Apôtres impressionne. À l’injonction de se taire, de ne plus enseigner au nom de Jésus, de ne plus annoncer son Message, ils répondent avec clarté : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes ». Et le fait d’être flagellés, de subir des outrages et d’être emprisonnés ne les freine pas non plus. Pierre et les Apôtres annoncent avec courage, en toute vérité, ce qu’ils ont reçu, l’Évangile de Jésus. Et nous ? Sommes-nous capables de porter la Parole de Dieu dans nos milieux de vie ? Savons-nous parler du Christ, de ce qu’il représente pour nous, en famille, avec les personnes qui partagent notre vie quotidienne ? La foi naît de l’écoute, et se raffermit dans l’annonce.

2. Mais faisons un pas en avant : l’annonce de Pierre et des Apôtres n’est pas faite seulement de paroles, mais la fidélité au Christ touche leur vie, qui est changée, qui reçoit une nouvelle direction, et c’est justement par leur vie qu’ils rendent témoignage à la foi et à l’annonce du Christ. Dans l’Évangile, Jésus demande à Pierre par trois fois de paître son troupeau et de le paître par son amour, et il lui prophétise : « Quand tu seras vieux, tu étendras les mains, et c’est un autre qui te mettra ta ceinture, pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller » (Jn 21, 18). C’est une parole adressée surtout à nous Pasteurs : nous ne pouvons pas paître le troupeau de Dieu si nous n’acceptons pas d’être conduits par la volonté de Dieu là aussi où nous ne voudrions pas, si nous ne sommes pas prêts à témoigner du Christ par le don de nous-mêmes, sans réserve, sans calculs, quelquefois au prix de notre vie. Mais cela vaut pour tous : l’Évangile doit être annoncé et témoigné. Chacun de nous devrait se demander : Comment moi, je témoigne du Christ par ma foi ? Ai-je le courage de Pierre et des autres Apôtres de penser, de choisir et de vivre en chrétien, dans l’obéissance à Dieu ? Le témoignage de la foi a certainement plusieurs formes, comme dans une grande fresque, où il y a une variété de couleurs et de nuances ; toutes cependant sont importantes, mêmes celles qui n’apparaissent pas. Dans le grand dessein de Dieu, chaque détail est important, même ton témoignage et le mien, humbles et petits, même le témoignage caché de celui qui vit avec simplicité sa foi dans le quotidien des relations de famille, de travail, d’amitié. Il y a les saints de tous les jours, les saints « cachés », une sorte de « classe moyenne de la sainteté », comme le disait un auteur français, cette « classe moyenne de la sainteté » dont nous pouvons tous faire partie. Mais en diverses parties du monde, il y a aussi des personnes qui souffrent, comme Pierre et les Apôtres, à cause de l’Évangile ; il y a des personnes qui donnent leur vie pour rester fidèles au Christ par un témoignage marqué par le prix du sang. Souvenons-nous en bien tous : on ne peut pas annoncer l’Évangile de Jésus sans le témoignage concret de la vie. Qui nous écoute et nous voit doit pouvoir lire à travers nos actions ce qu’il écoute de notre bouche et rendre gloire à Dieu ! Me vient à l’esprit en ce moment un conseil que saint François d’Assise donnait à ses frères : prêchez l’Évangile et, si c’était nécessaire, aussi par les paroles. Prêcher par la vie : le témoignage. L’incohérence entre ce que disent les fidèles et les pasteurs, et ce qu’ils font, entre leur parole et leur façon de vivre mine la crédibilité de l’Église.

3. Mais tout cela est possible seulement si nous reconnaissons Jésus Christ, car c’est lui qui nous a appelés, qui nous a invités à parcourir son chemin, qui nous a choisis. Il est possible d’annoncer et de témoigner seulement si nous sommes proches de lui, exactement comme Pierre, Jean et les autres disciples, dans le passage de l’Évangile d’aujourd’hui, sont autour de Jésus ressuscité ; il y a une proximité quotidienne avec lui, et ils savent bien qui il est, ils le connaissent. L’évangéliste souligne que « personne n’osait lui demander : “qui es-tu ?” Ils savaient que c’était le Seigneur » (Jn 21, 12). Et c’est un point important pour nous : vivre une relation intense avec Jésus, une intimité de dialogue et de vie, pour ainsi le reconnaître comme “le Seigneur”. L’adorer ! Le passage de l’Apocalypse que nous avons écouté nous parle de l’adoration : la multitude d’anges, toutes les créatures, les êtres vivants, les anciens, se prosternent en adoration devant le Trône de Dieu et l’Agneau immolé, qui est le Christ, à qui vont la louange, l’honneur et la gloire (cf. Ap 5, 11-14). Je voudrais que nous nous posions tous cette question : Toi, moi, adorons-nous le Seigneur ? Allons-nous à Dieu seulement pour demander, pour remercier, ou allons-nous à lui aussi pour l’adorer ? Que veut dire alors adorer Dieu ? Cela signifie apprendre à rester avec lui, à nous arrêter pour dialoguer avec lui, en sentant que sa présence est la plus vraie, la meilleure, la plus importante de toutes. Chacun de nous, dans sa propre vie, de manière inconsciente et peut-être parfois sans s’en rendre compte, a un ordre bien précis des choses qu’il retient plus ou moins importantes. Adorer le Seigneur veut dire lui donner la place qu’il doit avoir ; adorer le Seigneur veut dire affirmer, croire, non pas simplement en paroles, que lui seul guide vraiment notre vie ; adorer le Seigneur veut dire que devant lui nous sommes convaincus qu’il est le seul Dieu, le Dieu de notre vie, le Dieu de notre histoire.

4. Cela a une conséquence dans notre vie : se dépouiller de beaucoup d’idoles petites et grandes que nous avons, et dans lesquelles nous nous réfugions, dans lesquelles nous cherchons et plaçons bien des fois notre sécurité. Ce sont des idoles que nous tenons souvent cachées ; elles peuvent être l’ambition, le carriérisme, le goût du succès, le fait de se mettre soi-même au centre, la tendance à dominer les autres, la prétention d’être les seuls maîtres de notre vie, quelques péchés auxquels nous sommes attachés, et beaucoup d’autres. Ce soir, je voudrais qu’une question résonne dans le cœur de chacun de nous et que nous y répondions avec sincérité : ai-je pensé, moi, à cette idole cachée que j’ai dans ma vie et qui m’empêche d’adorer le Seigneur ? Adorer c’est se dépouiller de nos idoles mêmes les plus cachées, et choisir le Seigneur comme le centre, comme la voie royale de notre vie.

Chers frères et sœurs, le Seigneur nous appelle chaque jour à le suivre avec courage et fidélité ; il nous a fait le grand don de nous choisir comme ses disciples ; il nous invite à l’annoncer avec joie comme le Ressuscité, mais il nous demande de le faire par la parole et par le témoignage de notre vie, dans le quotidien. Le Seigneur est l’unique, l’unique Dieu de notre vie et il nous invite à nous dépouiller des nombreuses idoles et à l’adorer lui seul. Annoncer, témoigner, adorer. Puissent la Bienheureuse Vierge Marie et l’Apôtre Paul nous aider sur ce chemin et intercéder pour nous. Ainsi soit-il.

Messe du Pape François à Saint-Paul-hors-les-murs

La force de témoigner

Paroles du pape François avant le Regina Coeli.

Chers frères et sœurs,

Bonjour ! (applaudissements)

Je voudrais m’arrêter brièvement sur l’extrait des Actes des apôtres que l’on lit dans la Liturgie de ce troisième dimanche de Pâques. Ce texte rapporte que la première prédication des Apôtres à Jérusalem remplit la ville de la nouvelle que Jésus était vraiment ressuscité, selon les Ecritures, et qu’il était le Messie annoncé par les prophètes. Les grands prêtres et les chefs de la ville cherchaient à étouffer dans le germe la communauté des croyants au Christ et firent emprisonner les Apôtres, leur ordonnant de ne plus enseigner en son nom. Mais Pierre et les autres Onze répondirent : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. Le Dieu de nos pères a ressuscité Jésus…, l’a élevé en faisant de lui le Chef, le Sauveur, … Quant à nous, nous sommes les témoins de tout cela, avec l'Esprit Saint » (Ac 5, 29-32). Alors ils firent flageller les Apôtres et leur interdirent à nouveau de parler au nom de Jésus. Et eux repartirent, comme le dit l’Ecriture, « tout joyeux d'avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus. » (v. 41).

Je me demande : où est-ce que les premiers disciples trouvent la force de témoigner ? Et pas seulement : d’où leur venaient la joie et le courage de l’annonce, malgré les obstacles et les violences ? N’oublions pas que les Apôtres étaient des personnes simples, ils n’étaient pas des scribes, des docteurs de la loi, et n’appartenaient pas à la classe sacerdotale. Comment ont-ils pu, avec leurs limites et malgré les contradictions des autorités, remplir Jérusalem avec leur enseignement (cf. Ac 5,28)? Il est clair que seules la présence avec eux du Seigneur ressuscité et l’action de l’Esprit Saint peuvent expliquer ce fait. Le Seigneur qui était avec eux et l’Esprit qui les poussait à la prédication expliquent ce fait extraordinaire. Leur foi se fondait sur une expérience si forte et personnelle du Christ mort et ressuscité, qu’ils n’avaient peur de rien et de personne, et même voyaient les persécutions comme un honneur, qui leur permettait de suivre les traces de Jésus et de Lui ressembler, en témoignant par leur vie.

Cette histoire de la première communauté chrétienne nous dit une chose très importante, qui vaut pour l’Eglise de tous les temps, et pour nous aussi : quand une personne connaît vraiment Jésus Christ et croit en Lui, elle expérimente sa présence et la force de sa Résurrection dans sa vie, et ne peut faire autrement que de communiquer cette expérience. Et si cette personne rencontre des incompréhensions ou des adversités, elle se comporte comme Jésus dans sa Passion : elle répond avec l’amour et avec la force de la vérité.

Priant ensemble le Regina Caeli, demandons l’aide de la Très Sainte Vierge afin que l’Eglise dans le monde entier annonce avec franchise et courage la Résurrection du Seigneur et en donne un témoignage valide avec des signes d’amour fraternel. L’amour fraternel est le meilleur témoignage que nous puissions donner de Jésus vivant avec nous, de Jésus ressuscité. Prions de façon particulière pour les chrétiens qui souffrent la persécution ; en ce moment tant de chrétiens souffrent des persécutions, tant, tant, et dans tant de pays : prions pour eux, avec amour, dans notre coeur. Qu’ils sentent la présence vive et réconfortante du Seigneur ressuscité.

vendredi 12 avril 2013

Le centre de notre foi n'est pas seulement un livre

Discours du Pape François à la Commission Pontificale Biblique.

Chers membres de la Commission biblique pontificale,

Je suis heureux de vous accueillir au terme de votre Assemblée plénière annuelle. Je remercie le président l’archevêque Gerhard Ludwig Müller, pour ses salutations et son exposition concise du thème qui a été l’objet des réflexions attentives de vos travaux. Vous êtes à nouveau rassemblés pour approfondir un sujet très important : l'inspiration et la vérité de la Bible. Il s’agit d’un thème qui concerne non seulement le croyant singulier, mais l’Eglise entière, car la vie et la mission de l’Eglise se fondent sur la Parole de Dieu, qui est l’âme de la théologie et l’inspiratrice de toute l’existence chrétienne.

Comme nous le savons, les Saintes Ecritures sont le témoignage sous forme écrite de la Parole divine, le mémorial canonique qui atteste l'évènement de la Révélation. Donc la Parole de Dieu précède et dépasse la Bible. C’est pour cela que le centre de notre foi n’est pas seulement un livre, mais une histoire de salut et surtout une Personne, Jésus-Christ, Parole de Dieu faire chair. Et parce que l’horizon de la Parole divine embrasse et s’étend au-delà de l’Ecriture, il faut, pour la comprendre adéquatement, la constante présence de l’Esprit-Saint qui « conduit vers la vérité tout entière » (Jn 16,13). Il est nécessaire de se placer dans le courant de la grande Tradition qui, sous l’assistance de l’Esprit-Saint et la conduite du Magistère, a reconnu les écrits canoniques comme Parole adressée par Dieu à son peuple et n’a jamais cessé de les méditer et d’en découvrir les inépuisables richesses. Le Concile Vatican II l’a confirmé avec grande clarté dans la Constitution dogmatique Dei Verbum : « tout ce qui concerne la manière d’interpréter l’Écriture est finalement soumis au jugement de l’Église, qui exerce le ministère et le mandat divinement reçus de garder la Parole de Dieu et de l’interpréter » (n. 12).

Comme nous le rappelle encore la Constitution conciliaire susmentionnée, il existe une unité indissoluble entre Sainte Ecriture et Tradition, puisque toutes deux proviennent d’une même source : « La sainte Tradition et la Sainte Écriture sont donc reliées et communiquent étroitement entre elles. Car toutes deux, jaillissant de la même source divine, ne forment pour ainsi dire qu’un tout et tendent à une même fin. En effet, la Sainte Écriture est la Parole de Dieu en tant que, sous l’inspiration de l’Esprit divin, elle est consignée par écrit ; quant à la sainte Tradition, elle porte la Parole de Dieu, confiée par le Christ Seigneur et par l’Esprit Saint aux Apôtres, et la transmet intégralement à leurs successeurs, pour que, illuminés par l’Esprit de vérité, en la prêchant, ils la gardent, l’exposent et la répandent avec fidélité : il en résulte que l’Église ne tire pas de la seule Écriture Sainte sa certitude sur tous les points de la Révélation. C’est pourquoi l’une et l’autre doivent être reçues et vénérées avec un égal sentiment d’amour et de respect » (ibid., 9).

Il s’en suit par conséquent que l’exégète doit être attentif à percevoir la Parole de Dieu présente dans les textes bibliques en les plaçant à l’intérieur de la foi de l’Eglise. L'interprétation des Saintes Ecritures ne peut être seulement un effort scientifique individuel, mais doit être toujours confrontée, intégrée et authentifiée par la tradition vivante de l’Eglise. Cette norme est décisive pour préciser le rapport correct et réciproque entre l’exégèse et le Magistère de l’Eglise. Les textes inspirés par Dieu ont été confiés à la Communauté des croyants, à l’Eglise du Christ, pour alimenter la foi et guider la vie de charité. Le respect de cette nature profonde des Ecritures conditionne la validité même et l’efficacité de l'herméneutique biblique. Ce qui montre l'insuffisance de toute interprétation subjective ou simplement limitée à une analyse incapable d’accueillir ce sens global, qui au cours des siècles a constitué la Tradition du Peuple de Dieu entier, qui « in credendo falli nequit » (Conc. Ecum. Vat. II, Const dogm. Lumen gentium, 12).

Chers frères, je désirerais conclure mon intervention en formulant mes remerciements à vous tous et en vous encourageant dans votre précieux travail. Que le Seigneur Jésus Christ, Verbe de Dieu incarné et divin Maître qui a ouvert l’esprit et le coeur de ses disciples à l’intelligence des Ecritures (cf. Lc 24,45), guide et soutienne toujours votre activité. Que la Vierge Marie, modèle de docilité et d’obéissance à la Parole de Dieu, vous enseigne à accueillir pleinement la richesse inépuisable de la Sainte Ecriture, non seulement à travers la recherche intellectuelle, mais dans la prière et dans toute votre vie de croyants, spécialement en cette Année de la foi, afin que votre travail contribue à faire resplendir la lumière de la Sainte Ecriture dans les cœurs des fidèles. En vous souhaitant une continuation fructueuse de vos activités, j’invoque sur vous la lumière de l’Esprit Saint et je donne à tous ma Bénédiction.

mercredi 10 avril 2013

Vivre en chrétiens malgré nos faiblesses

Audience Générale du Pape François.

Chers frères et sœurs, bonjour !


Au cours de la dernière catéchèse, nous nous sommes arrêtés sur l’événement de la Résurrection de Jésus, dans lequel les femmes ont eu un rôle particulier. Aujourd’hui, je voudrais m’arrêter sur sa portée salvifique. Que signifie la Résurrection pour notre vie ? Et pourquoi notre foi est-elle vaine sans elle ? Notre foi se fonde sur la Mort et la Résurrection du Christ, précisément comme une maison s’appuie sur des fondements : si ils cèdent, toute la maison s’écroule. Sur la Croix, Jésus s’est offert lui-même en assumant nos péchés et en descendant dans l’abîme de la mort, et dans la Résurrection, il les vainc, les ôte, et nous ouvre la voie pour renaître à une vie nouvelle. Saint Pierre l’exprime de façon synthétique au début de sa première lettre, comme nous l’avons écouté : « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ: dans sa grande miséricorde, il nous a engendrés de nouveau par la Résurrection de Jésus Christ d’entre les morts, pour une vivante espérance, pour un héritage exempt de corruption, de souillure, de flétrissure » (1, 3-4).

L’apôtre nous dit qu’avec la Résurrection de Jésus, quelque chose d’absolument nouveau a lieu : nous sommes libérés de l’esclavage du péché et nous devenons fils de Dieu, c’est-à-dire que nous sommes engendrés à nouveau à une vie nouvelle. Quand cela se réalise-t-il pour nous ? Dans le sacrement du baptême. Par le passé, il se recevait normalement par immersion. Celui qui devait être baptisé descendant dans le grand bassin du baptistère, quittant ses vêtements, et l’évêque ou le prêtre lui versait par trois fois l’eau sur la tête, le baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Puis, le baptisé sortait du bassin et revêtait le nouvel habit, blanc : c’est-à-dire qu’il naissait à une vie nouvelle, en se plongeant dans la Mort et la Résurrection du Christ. Il était devenu fils de Dieu. Saint Paul, dans la Lettre aux Romains, écrit : vous « avez reçu un esprit de fils adoptifs qui nous fait nous écrier : “Abba! Père!” » (Rm 8, 15). C’est précisément l’Esprit que nous avons reçu dans le baptême qui nous enseigne, nous pousse, à dire à Dieu : « Père », ou mieux, « Abba ! », ce qui signifie « papa ». Tel est notre Dieu : c’est un papa pour nous. L’Esprit Saint réalise en nous cette nouvelle condition de fils de Dieu. Et cela est le plus grand don que nous recevons du Mystère pascal de Jésus. Et Dieu nous traite comme ses enfants, il nous comprend, nous pardonne, nous embrasse, nous aime, même lorsque nous nous trompons. Dans l’Ancien Testament, le prophète Isaïe affirmait déjà que même si une mère oubliait son fils, Dieu ne nous oublie jamais, à aucun moment (cf. 49, 15). Et cela est beau !

Toutefois, cette relation filiale avec Dieu n’est pas comme un trésor que nous conservons dans un coin de notre vie, mais elle doit croître, elle doit être nourrie chaque jour par l’écoute de la Parole de Dieu, la prière, la participation aux sacrements, en particulier de la pénitence et de l’Eucharistie, et la charité. Nous pouvons vivre en fils ! Telle est notre dignité — nous avons la dignité de fils. Nous comporter comme de véritables fils ! Cela signifie que chaque jour, nous devons laisser le Christ nous transformer et nous configurer à Lui ; cela signifie vivre en chrétiens, chercher à le suivre, même si nous voyons nos limites et nos faiblesses. La tentation de laisser Dieu de côté pour nous mettre nous-mêmes au centre est toujours présente et l’expérience du péché blesse notre vie chrétienne, notre condition d’enfants de Dieu. C’est pourquoi nous devons avoir le courage de la foi et ne pas nous laisser guider par la mentalité qui nous dit : « Dieu ne sert pas, il n’est pas important pour toi », et ainsi de suite. C’est précisément le contraire : ce n’est qu’en nous comportant en enfants de Dieu, sans nous décourager pour nos chutes, pour nos péchés, en nous sentant aimés par Lui, que notre vie sera renouvelée, animée par la sérénité et par la joie. Dieu est notre force ! Dieu est notre espérance !

Chers frères et sœurs, nous devons être les premiers à avoir cette ferme espérance et nous devons en être un signe visible, clair, lumineux pour tous. Le Seigneur Ressuscité est l’espérance qui ne fait jamais défaut, qui ne déçoit pas (cf. Rm 5, 5). L’espérance ne déçoit pas. Celle du Seigneur ! Combien de fois dans notre vie les espérances s’évanouissent-elles, combien de fois les attentes que nous portons dans notre cœur ne se réalisent pas ! Notre espérance de chrétiens est forte, sûre, solide sur cette terre, où Dieu nous a appelés à marcher, et elle est ouverte à l’éternité, parce qu’elle est fondée sur Dieu, qui est toujours fidèle. Nous ne devons pas oublier : Dieu est toujours fidèle ; Dieu est toujours fidèle avec nous. Être ressuscités avec le Christ au moyen du baptême, avec le don de la foi, pour un héritage qui ne se corrompt pas, nous conduit à rechercher davantage les choses de Dieu, à penser davantage à Lui, à le prier davantage. Etre chrétiens ne se réduit pas à suivre des commandements, mais veut dire être en Christ, penser comme Lui, agir comme Lui, aimer comme Lui ; c’est Le laisser prendre possession de notre vie et la changer, la transformer, la libérer des ténèbres du mal et du péché.

Chers frères et sœurs, à ceux qui nous demandent raison de l’espérance qui est en nous (cf. 1 P 3, 15), nous montrons le Christ Ressuscité. Nous le montrons à travers l’annonce de la Parole, mais surtout à travers notre vie de ressuscités. Nous montrons la joie d’être des enfants de Dieu, la liberté que nous donne la vie en Christ, qui est la véritable liberté, celle qui nous sauve de l’esclavage du mal, du péché, de la mort ! Tournons-nous vers la Patrie céleste, nous aurons une lumière et une force nouvelles également dans notre engagement et dans nos difficultés quotidiennes. C’est un service précieux que nous devons rendre à notre monde, qui souvent ne réussit plus à lever les yeux vers le haut, qui ne réussit plus à lever les yeux vers Dieu.

Audience Générale du 10 avril 2013

dimanche 7 avril 2013

Dieu est patient avec nous car il nous aime

Homélie prononcée par le Pape François en la Basilique du Latran, pour la prise de possession de sa chaire d'évêque de Rome.


Avec joie je célèbre pour la première fois l’Eucharistie dans cette Basilique du Latran, Cathédrale de l’Évêque de Rome. Je vous salue tous avec grande affection [...]. Marchons ensemble dans la lumière du Seigneur Ressuscité.

1. Nous célébrons aujourd’hui le deuxième dimanche de Pâques, appelé aussi « de la Divine Miséricorde ». Qu’elle est belle, cette réalité de la foi pour notre vie : la miséricorde de Dieu ! Un amour aussi grand, aussi profond, celui de Dieu pour nous, un amour qui ne fait pas défaut, qui nous saisit toujours par la main et nous soutient, nous relève, nous guide.

2. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, l’apôtre Thomas fait justement l’expérience de la miséricorde de Dieu, qui a un visage concret, celui de Jésus, de Jésus Ressuscité. Thomas ne se fie pas à ce que les autres Apôtres lui disent : « Nous avons vu le Seigneur » ; la promesse de Jésus qui avait annoncé : je ressusciterai le troisième jour, ne lui suffit pas. Il veut voir, il veut mettre sa main dans la marque des clous et dans son côté. Et quelle est la réaction de Jésus ? La patience : Jésus n’abandonne pas Thomas l’entêté dans son incrédulité ; il lui donne le temps d’une semaine, il ne ferme pas la porte, il attend. Et Thomas reconnaît sa propre pauvreté, son peu de foi. « Mon Seigneur et mon Dieu » : par cette invocation simple mais pleine de foi, il répond à la patience de Jésus. Il se laisse envelopper par la miséricorde divine, il la voit en face, dans les plaies des mains et des pieds, dans le côté ouvert, et il retrouve la confiance : il est un homme nouveau, non plus incrédule, mais croyant.

Et rappelons-nous aussi Pierre : par trois fois il renie Jésus, juste au moment où il devait lui être plus proche ; et quand il touche le fond, il rencontre le regard de Jésus qui, avec patience, sans paroles, lui dit : « Pierre, n’aies pas peur de ta faiblesse, aies confiance en moi » ; et Pierre comprend, sent le regard d’amour de Jésus et pleure. Qu’il est beau, ce regard de Jésus – que de tendresse ! Frères et sœurs, ne perdons jamais confiance en la miséricorde patiente de Dieu !

Pensons aux deux disciples d’Emmaüs : le visage triste, une marche vaine, sans espérance. Mais Jésus ne les abandonne pas : il parcourt le chemin avec eux, et pas seulement ! Avec patience, il explique les Écritures qui le concernaient et il reste avec eux pour partager le repas. C’est le style de Dieu : il n’est pas impatient comme nous, nous qui voulons souvent tout et tout de suite, même avec les personnes. Dieu est patient avec nous car il nous aime, et qui aime comprend, espère, fait confiance, n’abandonne pas, ne coupe pas les ponts, sait pardonner. Souvenons-nous de cela dans notre vie de chrétiens : Dieu nous attend toujours, même quand nous nous sommes éloignés ! Lui n’est jamais loin, et si nous revenons à lui, il est prêt à nous embrasser.

Relire la parabole du Père miséricordieux me fait toujours grande impression, cela me fait impression parce qu’elle me donne toujours une grande espérance. Pensez au plus jeune fils qui était dans la maison de son Père, il était aimé ; et pourtant il veut sa part d’héritage ; il s’en va, il dépense tout, il arrive au plus bas niveau, plus loin de son Père ; et quand il a touché le fond, il a la nostalgie de la chaleur de la maison paternelle et il retourne. Et le Père ? Avait-il oublié son fils ? Non, jamais. Il est là, il l’aperçoit de loin, il l’attendait chaque jour, chaque moment : il est toujours resté dans cœur comme un fils, même s’il l’avait abandonné, même s’il avait dilapidé tout le patrimoine, c’est-à-dire sa liberté ; le Père, avec patience et amour, avec espérance et miséricorde n’avait pas cessé un instant de penser à lui, et à peine l’aperçoit-il encore au loin, il court à sa rencontre et l’embrasse avec tendresse, la tendresse de Dieu, sans une parole de reproche : il est revenu ! Et c’est cela la joie du père. Dans le fait d’embrasser son fils, il y a toute cette joie : il est revenu ! Dieu nous attend toujours, il ne se fatigue pas. Jésus nous manifeste cette patience miséricordieuse de Dieu pour que nous retrouvions confiance, espérance, toujours ! Un grand théologien allemand, Romano Guardini, disait que Dieu répond à notre faiblesse avec sa patience et c’est le motif de notre confiance, de notre espérance (cf. Glaubenserkenntnis, Würzburg 1949, p. 28). C’est comme un dialogue entre notre faiblesse et la patience de Dieu, c’est un dialogue qui nous donne espérance, si nous le faisons.

3. Je voudrais souligner un autre élément : la patience de Dieu doit trouver en nous le courage de revenir à lui, quelle que soit l’erreur, quel que soit le péché qui est dans notre vie. Jésus invite Thomas à mettre la main dans les plaies de ses mains et de ses pieds, et dans la blessure de son côté. Nous aussi nous pouvons entrer dans les plaies de Jésus, nous pouvons le toucher réellement ; et cela arrive chaque fois que nous recevons avec foi les Sacrements. Dans une belle homélie saint Bernard disait : « Par les plaies [de Jésus], je puis goûter le miel de ce roc et l’huile qui coule de la pierre très dure (cf. Dt 32, 13), c’est-à-dire goûter et voir combien le Seigneur est bon » (Homélie sur le Cantique des Cantiques 61, 4). C’est justement dans les plaies de Jésus que nous sommes assurés, c’est là que se manifeste l’immense amour de son cœur. Thomas l’avait compris. Saint Bernard se demande : mais sur quoi puis-je compter ? Sur mes mérites ? Mais « mon mérite, c’est (…) la miséricorde du Seigneur, et je ne manquerai pas de mérite tant que la miséricorde ne lui fera pas défaut. Si les miséricordes de Dieu se multiplient, mes mérites seront nombreux » (Id., 5). Ceci est important : le courage de m’en remettre à la miséricorde de Jésus, de compter sur sa patience, de me refugier toujours dans les plaies de son amour. Saint Bernard arrive à affirmer : « Mais qu’arrivera-t-il si j’ai à me reprocher quantité de fautes ? “Là où le péché s’était multiplié, la grâce à surabondé” (Rm 5, 20) » (Ibid.). Quelqu’un parmi nous peut peut-être penser : mon péché est tellement grand, mon éloignement de Dieu est comme celui du plus jeune fils de la parabole, mon incrédulité est comme celle de Thomas ; je n’ai pas le courage de retourner, de penser que Dieu puisse m’accueillir et qu’il m’attende, moi. Mais Dieu t’attend, toi, il te demande seulement le courage de venir à lui. Combien de fois dans mon ministère pastoral on m’a répété : « Père, j’ai beaucoup de péchés » ; et l’invitation que j’ai toujours faite est : « Ne crains pas, va chez lui, il t’attend, Lui fera tout ». Que de propositions mondaines entendons-nous autour de nous, mais laissons-nous saisir par la proposition de Dieu, la sienne est une caresse d’amour. Pour Dieu, nous ne sommes pas des numéros, nous sommes importants, ou mieux, nous sommes le plus important de ce qu’il a ; même pécheurs, nous sommes ce qui lui tient le plus à cœur.

Après son péché, Adam éprouve de la honte, il se sent nu, il ressent le poids de ce qu’il a fait ; et pourtant Dieu ne l’abandonne pas : si à ce moment-là, avec le péché, commence l’exil de chez Dieu, il y a déjà la promesse du retour, la possibilité de retourner à Dieu. Dieu demande immédiatement : « Adam, où es-tu ? », il le cherche. Jésus est devenu nu pour nous, il a pris sur lui la honte d’Adam, la nudité de son péché pour laver notre péché : par ses plaies nous avons été guéris. Rappelez-vous celui de Saint Paul : de quoi je me vanterai, sinon de ma faiblesse, de ma pauvreté ? C’est vraiment dans le fait de ressentir mon péché, dans le fait de regarder mon péché que je peux voir et rencontrer la miséricorde de Dieu, son amour et aller à lui pour en recevoir le pardon.

Dans ma vie personnelle, j’ai vu bien des fois le visage miséricordieux de Dieu, sa patience ; j’ai vu aussi en de nombreuses personnes le courage d’entrer dans les plaies de Jésus en lui disant : Seigneur, me voici, accepte ma pauvreté, cache dans tes plaies mon péché, lave-le avec ton sang. Et j’ai toujours vu que Dieu l’a fait, a accueilli, consolé, lavé, aimé.

Chers frères et sœurs, laissons-nous envelopper par la miséricorde de Dieu ; comptons sur sa patience qui nous donne toujours du temps ; ayons le courage de retourner dans sa maison, de demeurer dans les blessures de son amour, en nous laissant aimer par lui, de rencontrer sa miséricorde dans les Sacrements. Nous éprouverons sa tendresse, si belle, nous sentirons qu’il nous embrasse et nous serons nous aussi plus capables de miséricorde, de patience, de pardon, d’amour.

Prise de possession de la chaire d'Evêque de Rome

La béatitude de la foi

Paroles du pape François avant le Regina Coeli.

Chers frères et sœurs,

Bonjour ! (applaudissements)

En ce dimanche qui conclut l’Octave de Pâques, je renouvelle à tous mes vœux pascals avec les paroles mêmes de Jésus ressuscité : « La paix soit avec vous !». Ce n’est pas un salut, ni un simple vœu : c’est un don, LE don précieux que le Christ offre à ses disciples après être passé par la mort et les enfers.

Il donne la paix, comme il l’avait promis : « C'est la paix que je vous laisse, c'est ma paix que je vous donne ; ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne. » (Jn 14,27). Cette paix est le fruit de la victoire de l’amour de Dieu sur le mal, c’est le fruit du pardon. Et il en va ainsi : la vraie paix, la paix profonde, vient de l’expérience de la miséricorde de Dieu.

Aujourd’hui est le dimanche de la divine Miséricorde, par volonté du bienheureux Jean-Paul II (applaudissements), qui a d’ailleurs quitté ce monde en la veille de cette fête.

L’Evangile de Jean nous rapporte que Jésus apparaît deux fois aux Apôtres enfermés au Cénacle : la première, le soir même de la résurrection, alors que Thomas n’était pas là, lui qui a dit : Si je ne vois et si je ne touche pas, je ne croirai pas.

La seconde fois, huit jours plus tard, Thomas aussi était là. Et Jésus s’adressa à lui, l’invita à regarder les blessures, à les toucher ; et Thomas s’exclama : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jn 20,28). Jésus lui dit alors : « Parce que tu m'as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » (v. 29).

Et quels étaient ceux qui avaient cru sans voir ? D’autres disciples, d’autres hommes et femmes de Jérusalem qui, même sans avoir rencontré Jésus ressuscité, crurent sur le témoignage des Apôtres et des femmes.

C’est une parole très importante sur la foi, nous pouvons l’appeler la béatitude de la foi. Heureux ceux qui croient sans avoir vu, c’est la béatitude de la foi ! En tout temps et en tout lieu, heureux ceux qui, à travers la Parole de Dieu, proclamée dans l’Eglise et témoignée par les chrétiens, croient que Jésus-Christ est l’amour de Dieu incarné, la Miséricorde incarnée. Et ceci vaut pour chacun de nous !

Avec la paix, Jésus donne aussi l’Esprit-Saint aux Apôtres, afin qu’ils puissent répandre dans le monde le pardon des péchés, ce pardon que seul Dieu peut donner, et qui a coûté le Sang du Fils (cf. Jn 20,21-23).

L’Eglise est envoyée par le Christ ressuscité pour transmettre aux hommes la rémission des péchés, et ainsi faire grandir le Règne de l’amour, semer la paix dans les coeurs, afin qu’elle s’affirme aussi dans les relations, dans les sociétés, dans les institutions. Et l’Esprit du Christ ressuscité chasse la peur du cœur des Apôtres et les pousse à sortir du Cénacle pour porter l’Evangile. Ayons nous aussi plus de courage pour témoigner la foi dans le Christ ressuscité ! Nous ne devons pas avoir peur d’être chrétiens et de vivre en chrétiens !

Nous devons avoir ce courage d’aller et d’annoncer le Christ ressuscité car Il est notre paix. Il a fait la paix par son amour, par son pardon, par son sang et par sa miséricorde.

Chers amis, cet après-midi je célèbrerai l’Eucharistie dans la basilique de Saint-Jean-du-Latran, qui est la cathédrale de l’évêque de Rome. Prions ensemble la Vierge Marie, pour qu’elle nous aide, Evêque et Peuple, à cheminer dans la foi et dans la charité, en nous confiant toujours dans la miséricorde du Seigneur qui toujours nous attend, nous aime, qui nous a pardonné par son sang et nous pardonne chaque fois que nous allons à Lui demander le pardon. Ayons confiance dans sa miséricorde !


mercredi 3 avril 2013

La résurrection du Christ est notre plus grande certitude

Audience Générale du Pape François.

Chers frères et sœurs, bonjour. Nous reprenons aujourd’hui les catéchèses de l’Année de la foi.

Dans le Credo, nous redisons cette expression : « il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures ». C’est justement cet événement que nous célébrons : la résurrection de Jésus, centre du message chrétien, qui résonne depuis les commencements et qui a été transmis afin d’arriver jusqu’à nous. Saint Paul écrit ceci aux chrétiens de Corinthe : « Je vous ai donc transmis en premier lieu ce que j'avais moi-même reçu, à savoir que le Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures, qu'il a été mis au tombeau, qu'il est ressuscité le troisième jour selon les Écritures, qu'il est apparu à Céphas, puis aux Douze » (1 Co 15, 3-5).

Cette brève profession de foi annonce précisément le mystère pascal, avec les premières apparitions du Ressuscité à Pierre et aux Douze : La mort et la résurrection de Jésus sont le cœur de notre espérance. Sans cette foi en la mort et la résurrection de Jésus, notre espérance sera faible, mais ce ne sera même pas l’espérance, et c’est justement la mort et la résurrection de Jésus qui sont le cœur de notre espérance. L’apôtre affirme : « si le Christ n'est pas ressuscité, vaine est votre foi ; vous êtes encore dans vos péchés » (v. 17).

Malheureusement, on a souvent cherché à obscurcir la foi en la résurrection de Jésus et des doutes se sont insinués jusque parmi les croyants eux-mêmes. C’est un peu une foi « à l’eau de rose », comme on dit chez nous ; ce n’est pas la foi forte. Et ceci parce qu’on reste à la surface des choses, ou parfois par indifférence, parce qu’on est occupé par mille choses que l’on considère plus importantes que la foi, ou encore parce qu’on a une vision seulement horizontale de la vie. Mais c’est justement la Résurrection qui nous ouvre à l’espérance la plus grande, parce qu’elle ouvre notre vie et la vie du monde à l’avenir éternel de Dieu, au bonheur total, à la certitude que le mal, le péché et la mort peuvent être vaincus. Et cela amène à vivre les réalités quotidiennes avec plus de confiance, à les affronter avec courage et engagement. La résurrection du Christ illumine d’une lumière nouvelle ces réalités quotidiennes. La résurrection du Christ est notre force !

Mais comment cette vérité de foi de la résurrection du Christ nous a-t-elle été transmise ? Il y a deux sortes de témoignages dans le Nouveau Testament : certains ont la forme d’une profession de foi, c’est-à-dire de formules synthétiques qui indiquent quel est le centre de la foi ; d’autres, en revanche, prennent la forme d’un récit de l’événement de la résurrection et des faits qui y sont liés. La première, la profession de foi, par exemple, est celle que nous venons d’entendre, ou bien celle de la Lettre aux Romains, dans laquelle saint Paul écrit : « En effet, si tes lèvres confessent que Jésus est Seigneur et si ton cœur croit que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé » (10, 9).

Dès les premiers pas de l’Église, la foi dans le mystère de la mort et de la résurrection de Jésus est bien claire et solide. Mais aujourd’hui, je voudrais m’arrêter sur la seconde, sur le témoignage sous la forme d’un récit, que nous trouvons dans les Évangiles. Nous remarquons avant tout que les premiers témoins de cet événement furent les femmes. À l’aube, elles se rendent au sépulcre pour oindre le corps de Jésus et elles trouvent le premier signe : la tombe vide (cf. Mc 16, 1). Vient ensuite la rencontre avec un messager de Dieu qui annonce : Jésus de Nazareth, le Crucifié, n’est pas ici, il est ressuscité (cf. vv. 5-6). Les femmes sont poussées par l’amour et elles savent accueillir cette annonce avec foi : elles croient et, aussitôt, elles la transmettent, elles ne la gardent pas pour elles, elles la transmettent.

La joie de savoir que Jésus est vivant, l’espérance qui remplit le cœur, ne peuvent pas être contenues. C’est ce qui devrait aussi se passer dans notre vie. Nous éprouvons la joie d’être chrétiens ! Nous croyons en un Ressuscité qui a vaincu le mal et la mort ! Ayons le courage de « sortir » pour apporter cette joie et cette lumière dans tous les lieux de notre vie ! La résurrection du Christ est notre plus grande certitude : c’est le trésor le plus précieux ! Comment ne pas partager ce trésor, cette certitude, avec les autres ? Elle n’est pas uniquement pour nous, il faut la transmettre, la donner aux autres, la partager avec les autres. C’est justement cela notre témoignage.

Un autre élément : dans les professions de foi du Nouveau Testament, les témoins de la Résurrection qui sont mentionnés sont uniquement des hommes, les apôtres, mais pas les femmes. C’est parce que, selon la loi juive de l’époque, les femmes et les enfants ne pouvaient pas donner un témoignage fiable, crédible. Dans les Évangiles, au contraire, les femmes ont un rôle primordial, fondamental. Nous pouvons saisir ici un élément en faveur du caractère historique de la Résurrection : s’il s’était agi d’un fait inventé, dans le contexte de l’époque, il n’aurait pas pu se baser sur le témoignage des femmes. Les évangélistes, eux, racontent simplement ce qui s’est passé : les premiers témoins sont les femmes.

Ceci nous montre que Dieu ne choisit pas selon les critères humains : les premiers témoins de la naissance de Jésus sont les bergers, des gens simples et humbles ; les premiers témoins de la Résurrection sont les femmes. Et ça, c’est beau. Et c’est un peu la mission des femmes : des mamans, des femmes ! Témoigner auprès de leurs enfants, de leurs petits-enfants, que Jésus est vivant, qu’il est le Vivant, qu’il est ressuscité. Les mamans et les femmes, allez-y ! Témoignez !

Pour Dieu, c’est le cœur qui compte : combien nous sommes ouverts à sa présence, si nous sommes comme des enfants qui font confiance. Mais ceci nous fait réfléchir aussi sur la manière dont les femmes, dans l’Église et dans ce chemin de foi, ont eu, et ont encore aujourd’hui, le rôle particulier d’ouvrir les portes au Seigneur, de le suivre et de communiquer son Visage, parce que le regard de foi a toujours besoin du regard simple et profond de l’amour. Les apôtres et les disciples ont davantage de mal à croire. Les femmes, non. Pierre court au sépulcre, mais il s’arrête devant le tombeau vide ; Thomas doit toucher de ses mains les blessures du corps de Jésus. C’est important aussi, dans notre chemin de foi, de savoir et de sentir que Dieu nous aime, de ne pas avoir peur de l’aimer : la foi se professe avec les lèvres et avec le cœur, par les paroles et par l’amour.

Après les apparitions aux femmes, d’autres suivront. Jésus se rend présent de manière nouvelle : il est le Crucifié, mais son corps est glorieux ; il n’est pas revenu à la vie terrestre, mais il revêt une condition nouvelle. Au début, on ne le reconnaît pas, et c’est seulement grâce à ses paroles et à ses gestes que les yeux s’ouvrent : la rencontre avec le Ressuscité transforme, donne à la foi une nouvelle force, un fondement inébranlable. Pour nous aussi, il y a beaucoup de signes par lesquels Jésus se fait reconnaître : l’Écriture sainte, l’Eucharistie, les autres sacrements, la charité, ces gestes d’amour qui apportent un rayon du Ressuscité. Laissons-nous illuminer par la résurrection du Christ, laissons-nous transformer par sa force pour que, à travers nous, dans le monde, les signes de mort laissent place aux signes de vie.

J’ai vu qu’il y a beaucoup de jeunes sur la place. Les voici ! A vous, je vous dis : apportez cette certitude : le Seigneur est vivant et il marche à vos côtés dans votre vie. C’est votre mission ! Allez apporter cette espérance. Soyez ancrés dans cette espérance : cette ancre qui est dans le ciel ; tenez bien la corde, soyez ancrés et allez apporter cette espérance. Vous, les témoins de Jésus, allez apporter le témoignage que Jésus est vivant et cela nous donnera l’espérance, cela donnera de l’espérance à ce monde un peu vieilli par les guerres, le mal, le péché. Allez-y, les jeunes !