vendredi 31 janvier 2014

La doctrine entend assurer à notre foi un fondement sûr

Discours du Pape François aux participants à l'Assemblée Plénière de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.

Chers frères et sœurs,

Je vous rencontre au terme des travaux de votre session plénière ; je vous salue tous cordialement et je remercie Mgr Müller pour les paroles qu’il m’a adressées.

Les tâches de la Congrégation pour la doctrine de la foi sont liées à la mission du Successeur de Pierre de confirmer ses frères dans la foi (cf. Lc 22, 32). En ce sens, votre rôle, qui consiste à « promouvoir et à protéger la doctrine sur la foi et les usages dans tout le monde catholique » (Const. apost. Pastor bonus, n. 48) est un véritable service rendu au Magistère du Pape et à l’Église entière. C’est dans ce but que le dicastère s’engage pour que les critères de la foi prévalent toujours dans les paroles et la pratique de l’Église. Quand la foi brille dans sa simplicité et sa pureté originelles, le vécu ecclésial devient aussi le lieu où la vie de Dieu émerge dans toute sa capacité de fascination et porte du fruit. La foi en Jésus Christ, en effet, ouvre grand les cœurs à Dieu, ouvre les espaces de l’existence humaine à la vérité, au bien et à la beauté qui viennent de lui.

Depuis les premiers temps de l’Église, la tentation existe de comprendre la doctrine dans un sens idéologique ou de la réduire à un ensemble de théories abstraites et cristallisées (cf. Exhort. apost. Evangelii gaudium, nn. 39-42). En réalité, la doctrine a comme unique objectif de servir la vie du peuple de Dieu et elle entend assurer à notre foi un fondement sûr. En effet, la tentation est grande de s’approprier les dons du salut qui vient de Dieu, pour les soumettre — peut-être même avec de bonnes intentions — aux vues et à l’esprit du monde. Et ceci est une tentation qui se répète continuellement.

Avoir le souci de l’intégrité de la foi est une tâche très délicate qui vous est confiée, toujours en collaboration avec les pasteurs locaux et avec les commissions doctrinales des conférences épiscopales. Cela permet de sauvegarder le droit de tout le peuple de Dieu à recevoir le dépôt de la foi dans sa pureté et dans son intégralité. Votre travail cherche aussi à garder toujours présentes les exigences d’un dialogue constructif, respectueux et patient avec les auteurs. Si la vérité exige la fidélité, celle-ci grandit toujours dans la charité et dans l’aide fraternelle envers celui qui est appelé à mûrir ou à clarifier ses convictions.

Quant à votre méthode de travail, je sais que votre dicastère se distingue par la pratique de la collégialité et du dialogue. En effet, l’Église est le lieu de la communion et, à chaque niveau, nous sommes tous appelés à cultiver et à promouvoir la communion, chacun avec la responsabilité que le Seigneur lui a confiée. Je suis certain que plus la collégialité sera un signe distinctif de notre mode de travail, plus resplendira aux yeux du monde la lumière de notre foi (cf. Mt 5, 16).

Puissiez-vous, dans votre service, conserver toujours un profond sens de la joie, la joie de la foi, qui a sa source inépuisable dans le Seigneur Jésus. La grâce d’être ses disciples, de participer à la mission d’évangélisation de l’Église, nous remplit d’une sainte joie.

Au cours de la session plénière qui vient de se conclure, vous avez aussi traité du rapport entre la foi et le sacrement du mariage. Il s’agit là d’une réflexion d’une grande importance. Elle s’inscrit dans le sillage de l’invitation que BenoîtXVI avait déjà formulée sur la nécessité de s’interroger plus à fond sur la relation entre la foi personnelle et la célébration du sacrement du mariage, surtout dans le contexte culturel en mouvement (cf. Discours au tribunal de la Rote romaine, 26 janvier 2013).

Je voudrais saisir cette occasion pour vous remercier aussi pour votre engagement dans l’examen des problématiques délicates touchant à ce que l’on appelle les délits les plus graves, en particulier les cas d’abus sexuels sur des mineurs de la part de clercs. Pensez au bien des enfants et des jeunes qui, au sein de la communauté chrétienne, doivent toujours être protégés et soutenus dans leur croissance humaine et spirituelle. En ce sens, la possibilité de rattacher à votre dicastère la Commission spécifique que j’ai instituée pour la protection des enfants est à l’étude, et je voudrais qu’elle soit exemplaire pour tous ceux qui souhaitent promouvoir le bien des enfants.

Chers frères et sœurs, je vous assure de mon souvenir dans la prière et je me confie, ainsi que mon ministère, à la vôtre. Que le Seigneur vous bénisse et que la Vierge Marie vous protège.

jeudi 30 janvier 2014

Parler de Dieu est la tâche de chaque baptisé

Discours du Pape François aux prélats de la Conférence épiscopale autrichienne en visite ad limina.

Chers confrères,

Je suis heureux parce que cette rencontre intense avec vous, dans le contexte de votre visite ad limina, me fait don de quelques-uns des fruits de l’Église qui est en Autriche et me permet, à moi aussi, de donner quelque chose à votre Église. Je remercie votre président, le cardinal Schönborn, pour les paroles courtoises qu’il m’a adressées, et qui me donnent l’assurance que nous poursuivons ensemble le chemin de l’annonce du salut du Christ. Chacun de nous représente le Christ, l’unique médiateur du salut, et rend son action sacerdotale accessible et perceptible à la communauté, permettant ainsi à l’amour de Dieu d’être toujours présent dans le monde.

Il y a environ huit ans, à l’occasion de sa visite ad limina, la Conférence épiscopale autrichienne est venue en pèlerinage sur les tombes des apôtres Pierre et Paul et a rencontré la curie romaine pour une consultation. En cette circonstance, la majeure partie d’entre vous a aussi rencontré mon vénéré prédécesseur Benoît XVI qui, à cette époque, ne remplissait cette charge que depuis quelques mois. Les années qui ont immédiatement suivi ont été marquées par une sympathie de la part des Autrichiens pour l’Église et pour le Successeur de Pierre. Cela s’est manifesté, par exemple, dans l’accueil cordial, malgré la rigueur du temps, de la part de la population pendant la visite papale à l’occasion du 850e anniversaire du sanctuaire de Mariazell, en 2007. L’Église a ensuite traversé une phase difficile, dont le symptôme, entre autres, est la tendance à la baisse du nombre des catholiques par rapport à la population totale en Autriche, qui a diverses causes et qui se poursuit depuis désormais plusieurs décennies. Une telle évolution ne doit pas nous laisser inertes, mais doit au contraire stimuler nos efforts pour une nouvelle évangélisation toujours nécessaire. On note, par ailleurs, une plus grande disponibilité à la solidarité, la Caritas et d’autres œuvres d’entraide reçoivent de généreuses donations. La contribution des institutions ecclésiales dans les domaines de l’éducation et de la santé est également très appréciée par tous et constitue une partie incontournable de la société autrichienne.

Nous pouvons rendre grâce à Dieu pour ce que fait l’Église qui est en Autriche pour le salut des fidèles et pour le bien de tant de personnes, et je voudrais exprimer ma gratitude à chacun de vous et, à travers vous, aux prêtres, aux diacres, aux religieux, aux religieuses et aux laïcs engagés qui travaillent avec disponibilité et générosité dans la vigne du Seigneur. Mais nous ne devons pas seulement administrer ce que nous avons obtenu et qui est à notre disposition, le champ de Dieu doit être travaillé et cultivé sans cesse pour pouvoir porter du fruit également à l’avenir. Etre Église ne signifie pas gérer, mais sortir, être missionnaires, apporter aux hommes la lumière de la foi et la joie de l’Évangile. N’oublions pas que l’impulsion de notre engagement en tant que chrétiens dans le monde n’est pas une idée philanthropique, un vague humanisme, mais un don de Dieu, c’est-à-dire le cadeau de la filiation divine que nous avons reçu lors du baptême. Et ce don est en même temps un devoir. Les enfants de Dieu ne se cachent pas, au contraire, ils apportent la joie de leur filiation divine au monde. Et cela signifie aussi s’engager à mener une vie sainte. En outre, c’est pour nous un devoir à l’égard de l’Église, qui est sainte, comme nous le professons dans le Credo. Assurément, « l’Église compte des pécheurs en son sein », comme l’a affirmé le Concile Vatican II (Lumen gentium, n. 8). Mais le Concile dit, dans le même passage, que nous ne devons pas nous résigner au péché, c’est-à-dire que Ecclesia sancta simul et semper purificanda la sainte Église a toujours besoin de purification. Et cela signifie que nous devons être toujours engagés pour notre purification, à travers le sacrement de la réconciliation. La confession est le lieu où nous faisons l’expérience de l’amour miséricordieux de Dieu et où nous rencontrons le Christ, qui nous donne la force de la conversion et d’une nouvelle vie. Et en tant que pasteurs de l’Église, nous voulons aider les fidèles avec tendresse et compréhension à redécouvrir ce merveilleux sacrement et leur faire expérimenter, précisément dans ce don, l’amour du Bon Pasteur. Je vous prie donc de ne pas vous lasser d’inviter les hommes à rencontrer le Christ dans le sacrement de la pénitence et de la réconciliation.

Un domaine important de notre action de pasteurs est la famille. Elle se situe au cœur de l’Église évangélisatrice. « La famille chrétienne, en effet, est la première communauté appelée à annoncer l’Évangile à la personne humaine en développement et à conduire cette dernière, par une éducation et une catéchèse progressives, à sa pleine maturité humaine et chrétienne » (Familiaris consortio, n. 2). Le fondement sur lequel peut se développer une vie familiale harmonieuse, est surtout la fidélité matrimoniale. Malheureusement, à notre époque, nous voyons que la famille et le mariage, dans les pays du monde occidental, subissent une crise intérieure profonde. « Dans le cas de la famille, la fragilité des liens devient particulièrement grave parce qu’il s’agit de la cellule fondamentale de la société, du lieu où l’on apprend à vivre ensemble dans la différence et à appartenir aux autres et où les parents transmettent la foi aux enfants » (Evangelii gaudium, n. 66). La mondialisation et l’individualisme post-moderne favorisent un style de vie qui rend beaucoup plus difficile le développement et la stabilité des liens entre les personnes et ne favorise pas la promotion d’une culture de la famille. Un nouveau domaine missionnaire s’ouvre ici à l’Église, par exemple dans les groupes de familles dans lesquels un espace est créé pour les relations interpersonnelles et avec Dieu, où peut grandir une communion authentique qui accueille chacun de la même façon et qui ne se renferme pas dans des groupes élitistes, qui soigne les blessures, construit des ponts, part à la recherche de ceux qui sont éloignés et aide à « porter les fardeaux les uns des autres » (Ga 6, 2).

La famille est donc un lieu privilégié pour l’évangélisation et pour la transmission vitale de la foi. Faisons tout notre possible pour que l’on prie dans nos familles et que la foi y soit expérimentée et transmise comme partie intégrante de la vie quotidienne. La sollicitude de l’Église pour la famille commence par une bonne préparation et un accompagnement adapté des époux, ainsi que par l’exposition fidèle et claire de la doctrine de l’Église sur le mariage et la famille. Le mariage comme sacrement est un don de Dieu et, en même temps, un engagement. L’amour de deux époux est sanctifié par le Christ et les époux sont appelés à témoigner et à cultiver cette sainteté à travers leur fidélité l’un envers l’autre.

De la famille, Église domestique, nous passons rapidement à la paroisse, au grand domaine que le Seigneur nous a confié pour qu’il devienne fécond par notre travail pastoral. Les prêtres, les curés devraient être toujours conscients que leur tâche de gouvernement est un service profondément spirituel. C’est toujours le curé qui guide la communauté paroissiale, comptant en même temps sur l’aide et la contribution efficace de ses différents collaborateurs et de tous les fidèles laïcs. Nous ne devons pas courir le risque de ternir le ministère sacramentel du prêtre. Dans nos villes et nos villages, il y a des hommes courageux et d’autres qui sont timides, il y a des chrétiens missionnaires, et d’autres qui sont endormis. Et il y a les nombreuses personnes qui sont en recherche, même si elles ne le reconnaissent pas. Chacun est appelé, chacun est envoyé. Mais il n’est pas dit que le lieu de l’appel soit seulement le centre paroissial ; il n’est pas dit que le moment soit nécessairement un événement paroissial agréable, l’appel de Dieu peut nous rejoindre sur la chaîne de montage et au bureau, au supermarché, dans la cage des escaliers, c’est-à-dire dans les lieux de notre vie quotidienne.

Parler de Dieu, apporter aux hommes le message de l’amour de Dieu et du salut en Jésus Christ est la tâche de chaque baptisé. Une telle tâche consiste non seulement à parler avec des mots, mais comprend tout l’agir et le faire. Tout notre être doit parler de Dieu, y compris dans les choses ordinaires. C’est ainsi que notre témoignage est authentique, c’est ainsi qu’il sera aussi toujours nouveau et frais, dans la force du Saint-Esprit. Pour que cela réussisse, parler de Dieu doit avant tout consister à parler avec Dieu, être une rencontre avec le Dieu vivant dans la prière et les sacrements. Non seulement Dieu se laisse trouver, mais il se met aussi en mouvement par amour pour aller à la rencontre de celui qui le cherche. Celui qui se confie à l’amour de Dieu sait ouvrir les cœurs des autres à l’amour divin, pour leur montrer que la vie en plénitude ne se réalise qu’en communion avec Dieu. Précisément à notre époque, où il semble que nous soyons devenus le « petit troupeau » (Lc 12, 32), nous sommes appelés, en tant que disciples du Seigneur, à vivre comme une communauté qui est sel de la terre et lumière du monde (cf. Mt5, 13-16).

Que la Sainte Vierge Marie, qui est notre mère et que vous vénérez tout particulièrement comme Magna Mater Austriae, nous aide à nous ouvrir totalement au Seigneur, comme elle, et à être ainsi capables de montrer aux autres le chemin vers le Dieu vivant qui donne la vie.


mercredi 29 janvier 2014

Le sacrement de confirmation apporte une croissance de la grâce baptismale

Audience Générale du Pape François.

Chers frères est sœurs, bonjour,

Dans cette troisième catéchèse sur les sacrements, nous nous arrêtons sur la confirmation, qui doit être entendue en continuité avec le baptême, auquel elle est liée de manière inséparable. Ces deux sacrements, avec l’Eucharistie, forment un unique événement salvifique, qui s’appelle l’« initiation chrétienne », dans lequel nous sommes insérés en Jésus Christ mort et ressuscité et nous devenons de nouvelles créatures et membres de l’Église. Voilà pourquoi, à l’origine, ces trois sacrements étaient célébrés en un unique moment, au terme du chemin catéchuménal, normalement pendant la veillée pascale. C’est ainsi qu’était scellé le parcours de formation et d’insertion graduelle dans la communauté chrétienne, qui pouvait parfois durer quelques années. On avançait pas à pas pour arriver au baptême, puis à la confirmation et à l’Eucharistie.

On parle communément du sacrement de la « confirmation », un mot qui signifie « onction ». Et en effet, à travers l’huile appelée « saint chrême » nous sommes configurés, dans la puissance de l’Esprit, à Jésus Christ, qui est l’unique vrai « oint », le « Messie », le Saint de Dieu. Le terme « confirmation » nous rappelle ensuite que ce sacrement apporte une croissance de la grâce baptismale : il nous unit plus solidement au Christ ; il mène à son accomplissement notre lien avec l’Église ; il nous accorde une force particulière du Saint-Esprit pour diffuser et défendre la foi, pour confesser le nom du Christ et pour ne jamais avoir honte de sa croix (cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 1303).

C’est pourquoi il est important que nos enfants, nos jeunes, reçoivent ce sacrement. Nous avons tous soin qu’ils soient baptisés, et cela est bien, mais peut-être n’avons-nous pas autant soin qu’ils reçoivent la Confirmation. De cette manière, ils resteront à mi-chemin et ils ne recevront pas l’Esprit Saint, qui est si important dans la vie chrétienne, car il nous donne la force pour aller de l’avant. Pensons-y, chacun de nous : avons-nous vraiment le souci que nos enfants, nos jeunes reçoivent la Confirmation ? Cela est important, c’est important ! Et si vous, chez vous, vous avez des enfants, des jeunes, qui ne l’ont pas encore reçue et qui ont l’âge pour la recevoir, faite tout votre possible pour qu’ils mènent à bien l’initiation chrétienne et reçoivent la force du Saint-Esprit. C’est important !

Naturellement il est important d’offrir aux confirmands une bonne préparation, qui doit viser à les conduire vers une adhésion personnelle à la foi dans le Christ et à réveiller en eux le sens d’appartenance à l’Église.

La confirmation, comme chaque sacrement, n’est pas l’œuvre des hommes, mais de Dieu, qui prend soin de notre vie de manière à nous façonner à l’image de son Fils, pour nous rendre capables d’aimer comme Lui. Il le fait en infusant en nous son Saint-Esprit, dont l’action envahit toute la personne et toute la vie, comme cela transparaît des sept dons que la Tradition, à la lumière de l’Écriture Sainte, a toujours soulignés. Ces sept dons : je ne veux pas vous demander si vous vous rappelez les sept dons. Peut-être les savez-vous tous... Mais je les dis à votre place. Quels sont ces dons ? La sagesse, l’intellect, le conseil, la force, la science, la piété, et la crainte de Dieu. Et ces dons nous sont précisément donnés avec le Saint-Esprit dans le sacrement de la confirmation. C’est à ces dons que j’entends ensuite consacrer les catéchèses qui suivront celles sur les sacrements.

Quand nous accueillons le Saint-Esprit dans notre cœur et nous le laissons agir, le Christ lui-même se rend présent en nous et prend forme dans notre vie ; à travers nous, ce sera Lui, le Christ lui-même, qui priera, qui pardonnera, qui donnera l’espérance et la consolation, qui servira nos frères, qui se fera proche des nécessiteux et des derniers, qui créera la communion, qui sèmera la paix. Pensez à combien cela est important : au moyen du Saint-Esprit, le Christ lui-même vient faire tout cela parmi nous et pour nous. C’est pourquoi il est important que les enfants et les jeunes reçoivent le sacrement de la confirmation.

Chers frères et sœurs, rappelons-nous que nous avons reçu la confirmation ! Nous tous ! Rappelons-le tout d’abord pour rendre grâces au Seigneur de ce don, et ensuite pour lui demander de nous aider à vivre en vrais chrétiens, à marcher toujours avec joie selon le Saint-Esprit qui nous a été donné.

mardi 28 janvier 2014

Une vérité qui se dévoile dans la rencontre avec le Ressuscité

Message du Pape François à l'occasion de la 18e séance publique des Académies Pontificales.

À mon vénéré frère le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical pour la culture et du Conseil de coordination entre les Académies pontificales,

À l’occasion de la XVIIIe séance publique des Académies pontificales, j’ai le plaisir de vous envoyer mes plus cordiales salutations que j’étends volontiers aux présidents et aux académiciens, ainsi qu’aux cardinaux, aux évêques, aux ambassadeurs et à tous les participants.

La séance de cette année, convoquée expressément le jour de la mémoire liturgique de saint Thomas d’Aquin, a été organisée par l’Académie pontificale qui porte son nom, et a pour thème : « Oculata fides. Lire la réalité avec les yeux du Christ ». Ce thème renvoie à une expression du Doctor Angelicus citée dans la Lettre encyclique Lumen fidei. Je vous remercie d’avoir voulu proposer ce thème de réflexion, ainsi que les liens entre cette encyclique et la récente exhortation apostolique Evangelii gaudium.

Dans ces deux documents, en effet, j’ai voulu inviter à une réflexion sur la dimension « lumineuse » de la foi, et sur ce lien entre foi et vérité à analyser avec les yeux de l’esprit mais aussi avec les yeux du cœur, autrement dit dans une perspective d’amour. Saint Paul affirme : « Croire avec le cœur » (Rm 10, 10). « C’est dans cet entrecroisement de la foi avec l’amour que l’on comprend la forme de connaissance propre à la foi, sa force de conviction, sa capacité d’éclairer nos pas. La foi connaît dans la mesure où elle est liée à l’amour et dans la mesure où l’amour lui-même apporte une lumière. La compréhension de la foi est celle qui naît lorsque nous recevons le grand amour de Dieu qui nous transforme intérieurement et nous donne des yeux nouveaux pour voir la réalité » (Lumen fidei, n. 26). Au lendemain de la Résurrection de Jésus, ses disciples ne contemplèrent pas une vérité purement intérieure ou abstraite, mais une vérité qui se dévoilait à eux dans la rencontre avec le Ressuscité, dans la contemplation de sa vie, de ses mystères. À juste titre, saint Thomas d’Aquin affirme qu’il s’agit d’une oculata fides, d’une foi qui voit! (cf.ibid., 30).

D’où les importantes conséquences qui en découlent sur l’action des croyants et sur la méthode de travail des théologiens : « La vérité aujourd’hui est souvent réduite à une authenticité subjective de chacun, valable seulement pour la vie individuelle. Une vérité commune nous fait peur, parce que nous l’identifions avec l’imposition intransigeante des totalitarismes. Mais si la vérité est la vérité de l’amour, si c’est la vérité qui s’entrouvre dans la rencontre personnelle avec l’Autre et avec les autres, elle reste alors libérée de la fermeture dans l’individu et peut faire partie du bien commun… Loin de le raidir, la sécurité de la foi le met en route, et rend possible le témoignage et le dialogue avec tous » (ibid., n. 34).

Cette perspective — d’une Église totalement en marche et entièrement missionnaire — est celle qui est développée dans l’exhortation apostolique sur l’annonce de l’Evangile dans le monde actuel. Le « rêve d’un choix missionnaire capable de transformer toute chose » (Evangelii gaudium, n. 27) concerne l’Église entière et chacune de ses parties. Les Académies pontificales sont elles aussi appelées à cette transformation, pour que leur contribution ne manque pas au Corps ecclésial. Il ne s’agit cependant pas de faire des opérations extérieures, «de façade». Il s’agit plutôt, pour vous aussi, de vous concentrer davantage « sur l’essentiel, sur ce qui est plus beau, plus grand, plus attirant et en même temps plus nécessaire » (ibid., n. 35). De cette manière, « la proposition se simplifie, sans perdre pour cela profondeur et vérité, et devient ainsi plus convaincante et plus lumineuse » (ibid.). C’est pourquoi, chers et illustres frères, je demande votre collaboration qualifiée, au service de la mission de toute l’Église.

Et c’est justement pour encourager tous ceux qui, parmi les jeunes chercheurs en théologie, veulent offrir leur contribution à la promotion et à la réalisation d’un nouvel humanisme chrétien à travers leur recherche, que j’ai le plaisir de décerner ex aequo le Prix des Académies pontificales, consacré cette année à la recherche théologique et à l’étude des œuvres de saint Thomas d’Aquin, à deux jeunes chercheurs : le père Alessandro Clemenzia, pour son ouvrage intitulé « Dans la Trinité comme Église. Dialogue avec Heribert Mühlen » (Nella Trinità come Chiesa. In dialogo con Heribert Mühlen), et Mme Maria Silvia Vaccarezza pour son ouvrage « Les raisons du contingent. La sagesse pratique entre Aristote et Thomas d’Aquin » (Le ragioni del contingente. La saggezza pratica tra Aristotele e Tommaso d'Aquino).

Enfin, tout en souhaitant aux académiciens et aux personnes ici présentes un engagement fructueux dans leurs domaines de recherche respectifs, je confie chacun à la protection maternelle de la Vierge Marie, Sedes Sapientae, et je demande pour moi et mon ministère un souvenir dans la prière. De tout cœur, je vous donne une Bénédiction apostolique particulière.

Du Vatican, le 28 janvier 2014

dimanche 26 janvier 2014

Personne n'est exclu du Salut de Dieu

Paroles du Pape François avant l'Angelus.

Chers frères et sœurs, bonjour !

L’Évangile de ce dimanche raconte les débuts de la vie publique de Jésus dans les villes et dans les villages de Galilée. Sa mission ne part pas de Jérusalem, c’est-à-dire du centre religieux, centre également social et politique, mais elle part d’une zone périphérique, une zone méprisée par les juifs les plus observants, en raison de la présence dans cette région de différentes populations étrangères : c’est pourquoi le prophète Isaïe la désigne comme « Galilée des nations » (Is 8, 23).

C’est une terre de frontière, une zone de transit où l’on rencontre des personnes de races, de cultures et de religions différentes. La Galilée devient ainsi le lieu symbolique de l’ouverture de l’Évangile à tous les peuples. De ce point de vue, la Galilée ressemble au monde d’aujourd’hui : présence simultanée de différentes cultures, nécessité de confrontation et nécessité de rencontre. Nous aussi nous sommes immergés chaque jour dans une « Galilée des nations », et dans ce type de contexte, nous pouvons nous effrayer et céder à la tentation de construire des enclos pour être plus en sécurité, plus protégés. Mais Jésus nous enseigne que la Bonne nouvelle qu’Il apporte n’est pas réservée à une partie de l’humanité, mais est à communiquer à tous. C’est une annonce joyeuse destinée à ceux qui l’attendent mais aussi à ceux qui, peut-être, n’attendent plus rien et n’ont pas même la force de chercher et de demander.

En partant de la Galilée, Jésus nous enseigne que personne n’est exclu du salut de Dieu, au contraire, que Dieu préfère partir de la périphérie, des laissés-pour-compte, pour rejoindre chacun. Il nous enseigne une méthode, sa méthode, qui exprime le contenu, à savoir la miséricorde du Père. « Tout chrétien et toute communauté chrétienne discernera quel est le chemin que le Seigneur lui demande, mais nous sommes tous appelés à accepter cet appel : sortir de son confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile » (Evangelii gaudium, n. 20).

Non seulement Jésus commence sa mission depuis un lieu excentré, mais aussi par des hommes que l’on dirait de « basse extraction », en quelque sorte. Pour choisir ses premiers disciples, et futurs apôtres, il ne s’adresse pas aux écoles des scribes et des docteurs de la Loi, mais aux personnes humbles, aux personnes simples, qui se préparent avec zèle à la venue du Royaume de Dieu. Jésus va les appeler là où ils travaillent, sur la rive du lac : ce sont des pêcheurs. Il les appelle et eux le suivent immédiatement. Ils laissent les filets et ils partent avec lui : leur vie deviendra une aventure extraordinaire et fascinante.

Chers amies et amis, le Seigneur appelle aujourd’hui aussi ! Le Seigneur passe sur les routes de notre vie quotidienne. Aujourd’hui aussi, en ce moment, le Seigneur passe sur la place. Il nous appelle à aller avec Lui, à travailler avec Lui pour le Royaume de Dieu, dans les « Galilées » de notre époque. Que chacun de vous y pense : le Seigneur passe aujourd’hui, le Seigneur me regarde, il est en train de me regarder ! Que me dit le Seigneur ? Et si l’un d’entre vous entend le Seigneur lui dire : « Suis-moi ! », qu’il soit courageux, qu’il aille avec le Seigneur ! Le Seigneur ne déçoit jamais. Écoutez dans votre cœur si le Seigneur vous appelle à le suivre. Laissons-nous rejoindre par son regard, par sa voix, et suivons-le ! « Afin que la joie de l’Évangile parvienne jusqu’aux extrémités de la terre et qu’aucune périphérie ne soit privée de sa lumière » (ibid., n. 288).


Paroles du Pape à l'issue de l'Angélus.

Maintenant vous voyez que je ne suis pas seul : je suis en compagnie de deux d’entre vous qui sont montés ici : ils sont bien ces deux-là !

On célèbre aujourd’hui la Journée mondiale des malades de la lèpre. Bien que cette maladie régresse, elle frappe encore hélas de nombreuses personnes en situation de grave pauvreté. Il est important de maintenir une solidarité vivante avec ces frères et sœurs. Nous les assurons de notre prière ; et nous prions aussi pour tous ceux qui les assistent de différentes façons, qui s’engagent pour vaincre cette maladie.

Je suis proche de l’Ukraine par la prière, en particulier de ceux qui ont perdu la vie ces derniers jours et de leur familles. Je souhaite que se développe un dialogue constructif entre les institutions et la société civile, et, qu’en évitant tout recours à des actions violentes, l’esprit de paix et la recherche du bien commun l’emportent dans le cœur de chacun !

Aujourd’hui, il y a beaucoup d’enfants sur la place ! Avec eux, je voudrais adresser une pensée à Cocò Campolongo, qui, à trois ans, a été brûlé dans une voiture à Cassano allo Jonio. Cet acharnement sur un enfant si petit semble ne pas avoir de précédents dans l’histoire de la criminalité. Prions avec Cocò qui est, c’est sûr, au Ciel avec Jésus, pour les personnes qui ont commis ce crime, afin qu’elles se repentent et qu’elles se convertissent au Seigneur.

Des millions de personnes qui vivent en Extrême Orient ou qui vivent dispersées dans différentes régions du monde — Chinois, Coréens et Vietnamiens, notamment — vont célébrer le nouvel an lunaire ces prochains jours. Je leur souhaite à tous une existence pleine de joie et d’espérance. Que l’aspiration ineffaçable à la fraternité, qui habite leur cœur, trouve dans l’intimité de la famille le lieu privilégié où elle puisse être découverte, éduquée, et réalisée. Ce sera une contribution précieuse à la construction d’un monde plus humain où règne la paix.

Marie-Christine de Savoie a été proclamée bienheureuse hier, à Naples. Reine des deux Siciles, elle a vécu dans la première moitié du XIXe siècle. C’était une femme d’une spiritualité profonde et d’une grande humilité : elle a su prendre en charge les souffrances de son peuple en devenant une vraie mère pour les pauvres. Son exemple extraordinaire de charité témoigne que la bonne vie de l’Évangile est possible dans chaque milieu et dans chaque condition sociale.

Je m’adresse maintenant aux jeunes garçons et aux jeunes filles de l’Action catholique du diocèse de Rome ! Chers jeunes, cette année aussi, accompagnés du cardinal-vicaire, vous êtes venus nombreux au terme de votre « Caravane de la paix ». Je vous remercie ! Je vous remercie beaucoup ! Ecoutons maintenant le message que vos amis, ici, à mes côtés, vont nous lire. [Lecture du message] Et maintenant ces deux jeunes vont libérer les colombes, symboles de paix.


À tous, je souhaite un bon dimanche et un bon déjeuner. Au revoir !

samedi 25 janvier 2014

Sans la femme, la vocation humaine ne peut se réaliser

Discours du Pape François aux participantes au Congrès national du Centre italien des femmes.

Chères amies du Centre italien des femmes,

À l’occasion du Congrès de votre association je vous souhaite la bienvenue et vous adresse un salut cordial. Je remercie votre présidente pour ses paroles d’introduction à notre rencontre.
Avec vous, je rends grâce au Seigneur pour tout le bien qu’a accompli le Centre italien des femmes depuis presque soixante-dix ans d’existence, pour ses travaux dans le domaine de la formation et du développement humain et pour le témoignage qu’il a apporté en ce qui concerne le rôle de la femme dans la société et dans la communauté ecclésiale. En effet, au cours des dernières décennies, en même temps que d’autres transformations culturelles et sociales, l’identité et le rôle de la femme dans la famille, dans la société et dans l’Église, ont subi des changements importants, et en général la participation et la responsabilité des femmes ont augmenté.

Dans ce processus, aujourd’hui comme par le passé, le discernement du magistère papal reste également important. Nous citerons tout particulièrement la Lettre apostolique de 1998 du bienheureux Jean-Paul II, Mulieris dignitatem, sur la dignité et la vocation de la femme, un document qui, dans la ligne de l’enseignement du Concile Vatican II, a reconnu la force morale de la femme, sa force spirituelle (cf. n. 30) ; et rappelons-nous aussi le Message pour la Journée mondiale de la paix en 1995 sur le thème « La femme : éducatrice à la paix ».

Moi non plus je n’ai pas oublié la contribution essentielle de la femme dans la société, en particulier avec sa sensibilité et son intuition à l’égard de l’autre, des plus faibles et des personnes vulnérables, et je suis heureux de voir beaucoup de femmes partager certaines responsabilités pastorales avec les prêtres dans l’accompagnement des personnes, des familles et des groupes, comme dans la réflexion théologique. Et j’ai souhaité que l’on fasse plus de place à une présence féminine plus étendue et incisive au sein de l’Eglise (cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 103).

Ces nouveaux espaces et responsabilités qui se sont ouverts et dont je souhaite sincèrement qu’ils puissent élargir à l’avenir la présence et les activités des femmes, tant dans le milieu ecclésial que civil ou professionnel, ne peuvent pas nous faire oublier le rôle irremplaçable de la femme dans la famille. Les qualités de délicatesse, de sensibilité particulière et de tendresse qui abondent dans l’esprit féminin représentent non seulement une véritable force dans la vie des familles, le rayonnement d’un climat de sérénité et d’harmonie, mais aussi une réalité sans laquelle la vocation humaine ne pourrait exister. Et cela est important. Sans ces attitudes, sans ces qualités de la femme, la vocation humaine ne peut se réaliser.

Si dans le monde du travail et dans la sphère publique il est important que l’apport du génie féminin se fasse plus incisif, il demeure absolument indispensable dans la sphère familiale, qui pour nous chrétiens n’est pas simplement un lieu privé, mais cette « Église domestique » dont le salut et la prospérité conditionnent le salut et la prospérité de l’Église et de la société elle-même. Pensons à la Vierge : la Vierge dans l’Église crée quelque chose que ne peuvent créer les prêtres, les évêques, les Papes. C’est elle le génie authentique. Et pensons à la Vierge dans la famille. À ce que fait la Vierge dans une famille. La présence de la femme dans le milieu domestique s’avère donc plus que jamais nécessaire pour transmettre aux générations futures de solides principes moraux et transmettre la foi elle-même.

C’est là que se pose spontanément la question : comment peut-on accroître une présence efficace dans de nombreux domaines de la sphère publique, dans le monde du travail et là où sont prises les décisions les plus importantes, et en même temps maintenir une présence et attention préférentielle et toute particulière dans la famille et pour la famille ? C’est ici que, outre une réflexion sur la réalité de la femme dans la société, intervient le discernement qui nécessite la prière assidue et persévérante.

C’est dans le dialogue avec Dieu, illuminé par sa Parole, irrigué par la grâce des sacrements, que la femme chrétienne s’efforce toujours à nouveau de répondre à l’appel du Seigneur, dans la réalité de sa condition.

Une prière qui est toujours soutenue par la présence maternelle de Marie. Elle, qui a gardé son divin Fils, l’initiatrice de son premier miracle aux noces de Cana, qui était présente au Calvaire et à la Pentecôte, vous montre le chemin à parcourir pour approfondir le sens et le rôle des femmes dans la société et afin que vous soyez pleinement fidèles au Seigneur Jésus Christ et à votre mission dans le monde.

Le dialogue œcuménique est devenu un aspect essentiel du ministère de l’Évêque de Rome

Homélie du Pape François prononcée lors de la célébration des vêpres en la solennité de la Conversion de Saint Paul Apôtre.


« Le Christ, est-il divisé ? » (1 Co 1, 13). Le vigoureux rappel que saint Paul place au début de sa Première lettre aux Corinthiens, et qui a résonné dans la liturgie de ce soir, a été choisi par un groupe de frères chrétiens du Canada, comme piste pour notre méditation durant la Semaine de Prière de cette année.

L’Apôtre a appris avec grande tristesse que les chrétiens de Corinthe sont divisés en plusieurs factions. Il y a celui qui affirme : “Moi, je suis à Paul”; un autre dit : “ Et moi, à Apollos” ; un autre : “Et moi, à Céphas” ; et à la fin il y a aussi celui qui soutient : “Et moi, au Christ” (cf. v. 12). Pas même ceux qui entendent se référer au Christ ne peuvent être loués par Paul, parce qu’ils utilisent le nom de l’unique Sauveur pour prendre leurs distances avec d’autres frères à l’intérieur de la communauté. Autrement dit, l’expérience particulière de chacun, la référence à quelques personnes significatives de la communauté, deviennent la norme du jugement de la foi des autres.

Dans cette situation de division, Paul exhorte les chrétiens de Corinthe, « par le nom de notre Seigneur Jésus Christ », à être tous unanimes dans la façon de parler, pour qu’entre eux il n’y ait pas de divisions, mais une parfaite union d’esprit et de sentiments (cf.v. 10). La communion que l’Apôtre invoque, cependant, ne peut être le fruit de stratégies humaines. La parfaite union entre les frères, en effet, est possible seulement en référence à la pensée et aux sentiments du Christ (cf. Ph 2, 5). Ce soir, alors que nous sommes réunis ici en prière, nous sentons que le Christ, qui ne peut être divisé, veut nous attirer à lui, vers les sentiments de son cœur, vers son abandon total et confiant dans les mains du Père, vers son dépouillement radical par amour de l’humanité. Lui seul peut être le principe, la cause, le moteur de notre unité.

Tandis que nous nous trouvons en sa présence, devenons encore plus conscients que nous ne pouvons pas considérer les divisions dans l’Église comme un phénomène naturel, inévitable dans toute forme de vie associative. Nos divisions blessent son Corps, blessent le témoignage que nous sommes appelés à lui rendre dans le monde. Le Décret de Vatican II sur l’œcuménisme, rappelant le texte de saint Paul que nous avons médité, affirme de façon significative : « Une Église une et unique a été fondée par le Christ Seigneur, et pourtant plusieurs communions chrétiennes se présentent aux hommes comme représentant le véritable héritage de Jésus-Christ ; certes, tous confessent qu’ils sont les disciples du Seigneur, mais ils ont des opinions différentes et suivent des chemins différents, comme si le Christ lui-même était divisé ». Et puis, il ajoute : « Assurément, une telle division contredit ouvertement la volonté du Christ, et est un sujet de scandale pour le monde et une source de préjudices pour la très sainte cause de la prédication de l’Évangile à toute créature » (Unitatis redintegratio, 1). Nous tous nous avons subi des préjudices par les divisions. Nous tous nous ne voulons pas devenir un sujet de scandale. Et pour cela nous tous nous cheminons ensemble, fraternellement, sur la route vers l’unité, unis aussi en marchant, cette unité qui vient de l’Esprit Saint et qui nous apporte une singularité spéciale, que seulement l’Esprit Saint peut faire : la diversité réconciliée. Le Seigneur nous attend tous, il nous accompagne tous, il est avec nous tous sur ce chemin de l’unité.

Chers amis, le Christ ne peut être divisé! Cette certitude doit nous encourager et nous soutenir à poursuivre avec humilité et avec confiance le chemin vers le rétablissement de la pleine unité visible entre tous les croyants dans le Christ. J’aime penser en ce moment à l’œuvre de deux grands Papes : le bienheureux Jean XXIII et le bienheureux Jean-Paul II. Pour tous les deux, au cours de leur vie, a mûri la conscience de l’urgence de la cause de l’unité et, une fois élus Évêques de Rome, ils ont guidé avec détermination le troupeau catholique tout entier sur les routes de l’œcuménisme : le Pape Jean en ouvrant des voies nouvelles et auparavant presqu’impensables, le Pape Jean-Paul en proposant le dialogue œcuménique comme dimension ordinaire et incontournable de la vie de chaque Église particulière. Je leur associe aussi le Pape Paul VI, autre grand protagoniste du dialogue, dont nous rappelions justement en ces jours le cinquantième anniversaire de l’accolade historique avec le Patriarche Athénagoras de Constantinople.

L’œuvre de mes prédécesseurs a fait en sorte que la dimension du dialogue œcuménique est devenue un aspect essentiel du ministère de l’Évêque de Rome, si bien qu’aujourd’hui, on ne comprendrait pas pleinement le service pétrinien sans y inclure cette ouverture au dialogue avec tous les croyants dans le Christ. Nous pouvons dire aussi que le chemin œcuménique a permis d’approfondir la compréhension du ministère du Successeur de Pierre, et nous devons avoir confiance qu’il continuera d’agir dans ce sens aussi à l’avenir. Alors que nous regardons avec gratitude les pas que le Seigneur nous a permis d’accomplir, et sans nous cacher les difficultés que le dialogue œcuménique traverse aujourd’hui, nous demandons de pouvoir être tous revêtus des sentiments du Christ, pour pouvoir marcher vers l’unité voulue par lui. Et marcher ensemble c’est déjà faire unité !

Dans ce climat de prière pour le don de l’unité, je voudrais adresser mes salutations cordiales et fraternelles à Son Éminence le Métropolite Gennadios, représentant du Patriarcat œcuménique, à Sa Grâce David Moxon, représentant à Rome de l’Archevêque de Canterbury, et à tous les représentants des différentes Églises et Communautés ecclésiales, réunies ici ce soir. Avec ces deux frères, qui représentent tous, nous avons prié au tombeau de Paul et nous avons dit entre nous : « Prions pour qu’il nous aide sur ce chemin, sur ce chemin de l’unité, de l’amour, faisant un chemin d’unité ». L’unité ne viendra pas comme un miracle à la fin : l’unité vient dans le cheminement, c’est l’Esprit Saint qui la fait dans le cheminement. Si nous, nous ne marchons pas ensemble, si nous ne prions pas les uns pour les autres, si nous ne collaborons pas dans beaucoup de choses que nous pouvons faire ensemble dans ce monde pour le Peuple de Dieu, l’unité de viendra pas ! Elle se fait dans ce cheminement, à chaque pas, et nous ne la faisons pas nous : c’est l’Esprit Saint qui la fait, qui voit notre bonne volonté.

Chers frères et sœurs, prions le Seigneur Jésus, qui nous a rendus membres vivants de son Corps, afin qu’il nous maintienne profondément unis à lui, qu’il nous aide à dépasser nos conflits, nos divisions, nos égoïsmes ; et rappelons-nous que l’unité est toujours supérieure au conflit! Et qu’il nous aide à être unis les uns aux autres dans une unique force, celle de l’amour, que l’Esprit Saint répand dans nos cœurs (cf. Rm 5, 5). Amen.

vendredi 24 janvier 2014

La charité constitue l’âme de la fonction du juge ecclésiastique

Message du Pape François aux membres du Tribunal de la Rote romaine, pour l'inauguration de l'année judiciaire.

Chers auditeurs, officiaux et collaborateurs du tribunal apostolique de la Rote romaine,

Je vous rencontre pour la première fois, à l’occasion de l’inauguration de l’année judiciaire [...]. Cette rencontre m’offre l’opportunité de vous remercier pour votre précieux service ecclésial. Ma reconnaissance va en particulier à vous, juges de la Rote, qui êtes appelés à accomplir votre travail délicat au nom du Successeur de Pierre et sur son mandat.

La dimension juridique et la dimension pastorale du ministère ecclésial ne sont pas en opposition, car toutes deux concourent à la réalisation des finalités et de l’unité d’action propres à l’Église. L’activité judiciaire ecclésiale, qui se traduit comme service à la vérité dans la justice, a en effet une connotation profondément pastorale, car elle recherche la poursuite du bien des fidèles et l’édification de la communauté chrétienne. Cette activité constitue un développement particulier de la puissance de gouvernement, tourné vers le soin spirituel du peuple de Dieu, et elle est par conséquent pleinement intégrée dans le chemin de la mission de l’Église. Il s’ensuit que la charge judiciaire est une vraie diaconie, c’est-à-dire un service au peuple de Dieu en vue de la consolidation de la pleine communion entre les fidèles pris individuellement, et entre eux et la communauté ecclésiale. En outre, chers juges, par votre ministère spécifique, vous offrez une contribution compétente pour affronter les thématiques pastorales émergentes.

Je voudrais maintenant esquisser un bref profil du juge ecclésiastique. Tout d’abord le profil humain : il est demandé au juge une maturité humaine qui s’exprime dans la sérénité de jugement et dans la prise de distance des vues personnelles. La capacité de se plonger dans la mentalité et dans les aspirations légitimes de la communauté où s’accomplit le service fait aussi partie de la maturité humaine. Ainsi, il se fera l’interprète de cette animus communitatis qui caractérise la portion du Peuple de Dieu destinataire de son travail et il pourra pratiquer une justice non légaliste et abstraite, mais adaptée aux exigences de la réalité concrète. Par conséquent, il ne se contentera pas d’une connaissance superficielle de la réalité des personnes qui attendent son jugement, mais il ressentira la nécessité d’entrer en profondeur dans la situation des parties en cause, en étudiant à fond les actes et tous les éléments utiles pour le jugement.

Le second aspect est l’aspect judiciaire. Outre les compétences de doctrine juridique et théologique, dans l’exercice de son ministère le juge se caractérise par l’expertise en droit, l’objectivité de jugement et l’équité, en jugeant avec un équilibre imperturbable et impartial. En outre, dans son activité il est guidé par l’intention de défendre la vérité, dans le respect de la loi, sans omettre la délicatesse et l’humanité propres au pasteur d’âmes.

Le troisième aspect est l’aspect pastoral. En tant qu’expression de la sollicitude pastorale du Pape et des évêques, il est demandé au juge non seulement une compétence éprouvée, mais aussi un authentique esprit de service. Il est le serviteur de la justice, appelé à considérer et juger la condition des fidèles qui avec confiance s’adressent à lui, imitant le Bon Pasteur qui prend soin de la brebis blessée. C’est pourquoi il est animé par la charité pastorale ; cette charité que Dieu a répandue dans nos cœurs au moyen de « l’Esprit qui a été donné » (Rm 5,5). La charité — écrit saint Paul — « est le lien le plus parfait » (Col 3, 14), et constitue l’âme de la fonction du juge ecclésiastique.

Votre ministère, chers juges et agents du tribunal de la Rote romaine, vécu dans la joie et dans la sérénité qui découlent du fait de travailler là où le Seigneur nous a placés, est un service particulier au Dieu Amour, qui est proche de chaque personne. Vous êtes essentiellement pasteurs. Tandis que vous accomplissez le travail judiciaire, n’oubliez pas que vous êtes des pasteurs! Derrière chaque pratique, chaque position, chaque cause, il y a des personnes qui attendent justice.

Chers frères, je vous remercie et vous encourage à poursuivre votre munus scrupuleusement et avec douceur. Priez pour moi ! Que le Seigneur vous bénisse et que la Vierge vous protège.

N'ayez pas peur de devenir les citoyens du territoire numérique!

Message du Pape François pour la Journée Mondiale des Communications sociales 2014.

Chers frères et sœurs,

Aujourd'hui nous vivons dans un monde qui devient de plus en plus « petit » et où il semblerait alors facile de se faire proches les uns des autres. Le développement des transports et des technologies de communication nous rapprochent, nous connectant toujours plus, et la mondialisation nous rend interdépendants. Cependant, au sein de l'humanité persistent des divisions, parfois très marquées. Au niveau mondial, nous voyons l'écart scandaleux entre le luxe des plus riches et la misère des plus pauvres. Souvent il suffit d'aller dans les rues d'une ville pour voir le contraste entre les personnes vivant sur les trottoirs et les lumières étincelantes des boutiques. Nous y sommes tellement habitués que cela ne nous frappe plus. Le monde souffre de nombreuses formes d'exclusion, de marginalisation et de pauvreté ; ainsi que de conflits où se mélangent les causes économiques, politiques, idéologiques et, malheureusement, même religieuses.

Dans ce monde, les médias peuvent contribuer à nous faire sentir plus proches les uns des autres ; à nous faire percevoir un sens renouvelé de l'unité de la famille humaine, qui pousse à la solidarité et à l'engagement sérieux pour une vie plus digne. Bien communiquer nous aide à nous rapprocher et à mieux nous connaître les uns les autres, à être plus unis. Les murs qui nous divisent ne peuvent être surmontés que si nous sommes prêts à nous écouter et à apprendre les uns des autres. Nous avons besoin de régler les différences à travers des formes de dialogue qui nous permettent de grandir dans la compréhension et le respect. La culture de la rencontre exige que nous soyons disposés non seulement à donner, mais aussi à recevoir des autres. Les médias peuvent nous aider dans ce domaine, surtout aujourd'hui, alors que les réseaux de communication humaine ont atteint une évolution extraordinaire. En particulier, Internet peut offrir plus de possibilités de rencontre et de solidarité entre tous, et c'est une bonne chose, c’est un don de Dieu.

Il y a cependant des aspects problématiques : la vitesse de l’information dépasse notre capacité de réflexion et de jugement et ne permet pas une expression de soi mesurée et correcte. La variété des opinions exprimées peut être perçue comme une richesse, mais il est également possible de s’enfermer dans une sphère d'informations qui correspondent seulement à nos attentes et à nos idées, ou même à des intérêts politiques et économiques déterminés. L'environnement communicatif peut nous aider à grandir ou, au contraire, à nous désorienter. Le désir de connexion numérique peut finir par nous isoler de notre prochain, de nos plus proches voisins. Sans oublier ceux qui, pour diverses raisons, n'ont pas accès aux médias sociaux, et risquent d'être exclus.

Ces limites sont réelles, pourtant elles ne sauraient justifier un rejet des médias sociaux ; elles nous rappellent plutôt que la communication est, en définitive, une conquête plus humaine que technologique. Par conséquent, qu’est-ce qui nous aide dans l'environnement numérique à grandir en humanité et dans la compréhension mutuelle ? Par exemple, nous devons retrouver un certain sens de la lenteur et du calme. Ce qui demande du temps et la capacité de faire silence pour écouter. Nous avons également besoin d’être patients si nous voulons comprendre celui qui est différent de nous : la personne s'exprime pleinement non pas quand elle est simplement tolérée, mais lorsqu’elle se sait vraiment accueillie. Si nous désirons vraiment écouter les autres, alors nous apprendrons à regarder le monde avec des yeux différents, et à apprécier l'expérience humaine comme elle se manifeste dans différentes cultures et traditions. Mais nous saurons également mieux apprécier les grandes valeurs inspirées par le christianisme, comme la vision de l'homme en tant que personne, le mariage et la famille, la distinction entre la sphère religieuse et la sphère politique, les principes de solidarité et de subsidiarité et bien d'autres.

Alors, comment la communication peut-elle être au service d'une authentique culture de la rencontre ? Et pour nous, les disciples du Seigneur, que signifie rencontrer une personne selon l'Évangile ? Comment est-il possible, malgré toutes nos limites et nos péchés, d’être vraiment proches les uns des autres ? Ces questions se résument à celle qu'un jour, un scribe c'est-à-dire un communicateur, posa à Jésus : « Et qui est mon prochain ? » (Lc 10, 29). Cette question nous permet de comprendre la communication en termes de proximité. Nous pourrions la traduire ainsi : comment se manifeste la « proximité » dans l'utilisation des moyens de communication et dans le nouvel environnement créé par les technologies numériques ? Je trouve une réponse dans la parabole du bon Samaritain, qui est aussi une parabole du communicateur. Celui qui communique, en effet, se fait proche. Et le bon Samaritain non seulement se fait proche, mais il prend en charge cet homme qu’il voit à moitié mort sur le bord de la route. Jésus renverse la perspective : il ne s’agit pas de reconnaître l'autre comme mon semblable, mais de ma capacité de me faire semblable à l’autre. Communiquer signifie alors prendre conscience d’être humains, enfants de Dieu. J’aime définir ce pouvoir de la communication comme « proximité ».

Lorsque la communication est destinée avant tout à pousser à la consommation ou à la manipulation des personnes, nous sommes confrontés à une agression violente comme celle subie par l'homme blessé par les brigands et abandonné au bord de la route, comme nous le lisons dans la parabole. En lui le lévite et le prêtre ne considèrent pas leur prochain, mais un étranger dont il valait mieux se tenir à distance. À ce moment, ce qui les conditionnait, c’étaient les règles de pureté rituelle. Aujourd'hui, nous courons le risque que certains médias nous conditionnent au point de nous faire ignorer notre véritable prochain.

Il ne suffit pas de passer le long des « routes » numériques, c'est-à-dire simplement d’être connecté : il est nécessaire que la connexion s'accompagne d’une rencontre vraie. Nous ne pouvons pas vivre seuls, renfermés sur nous-mêmes. Nous avons besoin d'aimer et d’être aimés. Nous avons besoin de tendresse. Ce ne sont pas les stratégies de communication qui en garantissent la beauté, la bonté et la vérité. D'ailleurs le monde des médias ne peut être étranger au souci pour l'humanité, et il a vocation à exprimer la tendresse. Le réseau numérique peut être un lieu plein d'humanité, pas seulement un réseau de fils, mais de personnes humaines. La neutralité des médias n'est qu'apparente : seul celui qui communique en se mettant soi-même en jeu peut représenter un point de référence. L’implication personnelle est la racine même de la fiabilité d'un communicateur. Pour cette raison, le témoignage chrétien, grâce au réseau, peut atteindre les périphéries existentielles.

Je le répète souvent : entre une Église accidentée qui sort dans la rue, et une Église malade d’autoréférentialité, je n’ai pas de doutes : je préfère la première. Et les routes sont celles du monde où les gens vivent, où l’on peut les rejoindre effectivement et affectivement. Parmi ces routes, il y a aussi les routes numériques, bondées d'humanité, souvent blessée : hommes et femmes qui cherchent un salut ou une espérance. Aussi grâce au réseau, le message chrétien peut voyager « jusqu'aux extrémités de la terre » (Ac 1, 8). Ouvrir les portes des églises signifie aussi les ouvrir dans l'environnement numérique, soit pour que les gens entrent, quelles que soient les conditions de vie où ils se trouvent, soit pour que l'Évangile puisse franchir le seuil du temple et sortir à la rencontre de tous. Nous sommes appelés à témoigner d’une Église qui soit la maison de tous. Sommes-nous en mesure de communiquer le visage d'une telle Église ? La communication contribue à façonner la vocation missionnaire de l'Église tout entière, et les réseaux sociaux sont aujourd'hui l'un des endroits pour vivre cet appel à redécouvrir la beauté de la foi, la beauté de la rencontre avec le Christ. Même dans le contexte de la communication il faut une Église qui réussisse à apporter de la chaleur, à embraser le cœur.

Le témoignage chrétien ne se réalise pas avec le bombardement de messages religieux, mais avec la volonté de se donner soi-même aux autres « à travers la disponibilité à s'impliquer avec patience et respect dans leurs questions et leurs doutes, sur le chemin de la recherche de la vérité et du sens de l'existence humaine. » (Benoît XVI, Message pour la 47ème Journée mondiale des communications sociales, 2013). Pensons à l'épisode des disciples d'Emmaüs. Il faut savoir entrer en dialogue avec les hommes et les femmes d'aujourd'hui, pour en comprendre les attentes, les doutes, les espoirs, et leur proposer l'Évangile, c’est-à-dire Jésus Christ, Dieu fait homme, mort et ressuscité pour nous libérer du péché et de la mort. Le défi nécessite profondeur, attention à la vie, sensibilité spirituelle. Dialoguer signifie être convaincu que l'autre a quelque chose de bon à dire, faire de la place à son point de vue, à ses propositions. Dialoguer ne signifie pas renoncer à ses propres idées et traditions, mais à la prétention qu’elles soient uniques et absolues.

Que l'icône du bon Samaritain, qui soigne les blessures de l'homme blessé en y versant de l’huile et du vin, soit notre guide. Que notre communication soit une huile parfumée pour la douleur et le bon vin pour l’allégresse. Notre rayonnement ne provient pas de trucages ou d'effets spéciaux, mais de notre capacité de nous faire proche de toute personne blessée que nous rencontrons le long de la route, avec amour, avec tendresse. N'ayez pas peur de devenir les citoyens du territoire numérique. L'attention et la présence de l’Église sont importantes dans le monde de la communication, pour dialoguer avec l'homme d'aujourd'hui et l'amener à rencontrer le Christ : une Église qui accompagne le chemin, sait se mettre en marche avec tous. Dans ce contexte, la révolution des moyens de communication et de l'information est un grand et passionnant défi, qui requiert des énergies fraîches et une nouvelle imagination pour transmettre aux autres la beauté de Dieu.

Du Vatican, le 24 janvier 2014, mémoire de Saint François de Sales


mercredi 22 janvier 2014

Réjouissons-nous sincèrement des grâces accordées par Dieu à d’autres chrétiens

Audience Générale du Pape François.

Chers frères et sœurs, bonjour.

Samedi dernier a commencé la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, qui se conclura samedi prochain, fête de la Conversion de saint Paul apôtre. Cette initiative spirituelle, plus que jamais précieuse, voit la participation des communautés chrétiennes depuis plus de cent ans. Il s’agit d’un temps consacré à la prière pour l’unité de tous les baptisés, selon la volonté du Christ : « Que tous soient un » (Jn 17, 21). Chaque année, un groupe œcuménique d’une région du monde, sous la direction du Conseil œcuménique des Églises et du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, suggère le thème et prépare des documents de travail pour la Semaine de prière. Cette année, ces documents de travail proviennent des Églises et des Communautés ecclésiales du Canada, et font référence à la question adressée par saint Paul aux chrétiens de Corinthe : « Le Christ est-il divisé ? » (1 Co 1, 13).


Assurément le Christ n’a pas été divisé. Mais nous devons reconnaître sincèrement et avec douleur, que nos communautés continuent à vivre des divisions qui sont cause de scandale. Les divisions entre nous chrétiens sont un scandale. Il n’y a pas d’autre terme : un scandale. « Chacun de vous — écrivait l’apôtre — prend parti en disant : “Moi, j’appartiens à Paul”, ou bien : “Moi, j’appartiens à Apollos”, ou bien : “Moi, j’appartiens à Pierre”, ou bien: “Moi, j’appartiens au Christ” » (1, 12). Même ceux qui professaient le Christ comme leur chef ne sont pas applaudis par Paul, parce qu’ils utilisaient le nom du Christ pour se séparer des autres à l’intérieur de la communauté chrétienne. Mais le nom du Christ crée communion et unité, pas la division ! Il est venu pour établir la communion entre nous, pas pour nous diviser. Le baptême et la Croix sont des éléments centraux de la condition de disciple chrétien que nous avons en commun. Les divisions, en revanche, affaiblissent la crédibilité et l’efficacité de notre engagement d’évangélisation et risquent de vider la croix de sa puissance (cf. 1, 17).

Paul reproche leurs disputes aux Corinthiens, mais il rend également grâce au Seigneur « pour la grâce qu’il vous a donnée dans le Christ Jésus ; en lui vous avez reçu toutes les richesses, toutes celles de la parole et de la connaissance de Dieu » (1, 4-5). Ces paroles de Paul ne sont pas une simple formalité, mais le signe qu’il voit en premier lieu — et il se réjouit sincèrement de cela — les dons faits par Dieu à la communauté. Cette attitude de l’apôtre est un encouragement pour nous et pour chaque communauté chrétienne à reconnaître avec joie les dons de Dieu présents dans d’autres communautés. Malgré la souffrance des divisions, qui demeurent malheureusement encore, nous accueillons les paroles de Paul comme une invitation à nous réjouir sincèrement des grâces accordées par Dieu à d’autres chrétiens. Nous avons le même baptême, le même Saint-Esprit qui nous a donné la Grâce : reconnaissons-le et réjouissons-nous.

Il est beau de reconnaître la grâce avec laquelle Dieu nous bénit et, encore plus, de trouver chez d’autres chrétiens quelque chose dont nous avons besoin, quelque chose que nous pourrions recevoir comme un don de la part de nos frères et de nos sœurs. Le groupe canadien qui a préparé les documents de travail de cette Semaine de prière n’a pas invité les communautés à penser à ce qu’elles pourraient donner à leurs voisins chrétiens, mais les a exhortées à se rencontrer pour comprendre ce que toutes peuvent recevoir à chaque fois des autres. Cela demande quelque chose de plus. Cela demande beaucoup de prière, demande l’humilité, demande la réflexion et une conversion permanente. Allons de l’avant sur cette route, en priant pour l’unité des chrétiens, pour que ce scandale disparaisse et n’existe plus parmi nous.