Homélie du Pape François au cimetière romain de Campo Verano, en la solennité de la Toussaint.
À cette heure-ci, avant le coucher du soleil, dans ce cimetière nous nous recueillons et nous pensons à notre avenir, nous pensons à tous ceux qui s’en sont allés, qui nous ont précédés dans la vie et qui sont dans le Seigneur.
Elle est si belle cette vision du Ciel que nous avons entendue dans la première lecture : le Seigneur Dieu, la beauté, la bonté, la vérité, la tendresse, l’amour plénier. Tout cela nous attend. Ceux qui nous ont précédés et qui sont morts dans le Seigneur sont là. Ils proclament qu’ils n’ont pas été sauvés en raison de leurs œuvres — ils ont aussi accompli de bonnes œuvres — mais qu’ils ont été sauvés par le Seigneur : « Le salut est à notre Dieu, qui siège sur le trône et à l’Agneau » (Ap 7, 10). C’est Lui qui nous sauve, c’est Lui qui à la fin de notre vie nous emmène par la main comme un père, précisément dans ce Ciel où sont nos ancêtres. L’un des anciens pose une question : « Ceux-là qui sont vêtus de blanc, qui sont-ils et d’où viennent-ils ? » (v. 13). Qui sont ces justes, ces saints qui sont au Ciel ? Voici la réponse : « Ce sont ceux qui viennent de la grande tribulation et qui ont lavé leurs vêtements, les rendant blancs, dans le sang de l’Agneau » (v. 14).
Nous ne pouvons entrer au Ciel que grâce au sang de l’Agneau, grâce au sang du Christ. C’est justement le sang du Christ qui nous a justifiés, qui nous a ouvert les portes du Ciel. Et si aujourd’hui nous rappelons ces frères et sœurs qui nous ont précédés dans la vie et qui sont au Ciel, c’est parce qu’ils ont été lavés dans le sang de l’Agneau. Voilà notre espérance : l’espérance du sang du Christ ! Une espérance qui ne déçoit pas. Si nous marchons dans la vie avec le Seigneur, Il ne déçoit jamais !
Nous avons entendu dans la deuxième lecture ce que l’apôtre Jean disait à ses disciples : « Voyez comme il est grand, l'amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu — et nous le sommes. Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître (...). Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est » (1 Jn 3, 1-2). Voir Dieu, être semblables à Dieu : voilà notre espérance. Et aujourd’hui, justement en ce jour des saints et avant le jour des morts, il est nécessaire de penser un peu à l’espérance : cette espérance qui nous accompagne dans la vie. Les premiers chrétiens dépeignaient l’espérance comme une ancre, comme si la vie était l’ancre jetée sur le rivage du Ciel, et nous tous en marche vers ce rivage, agrippés au cordage de l’ancre.
C’est une belle image de l’espérance : avoir un cœur ancré là où sont nos ancêtres, où sont les saints, où est Jésus, où est Dieu. Voilà l’espérance qui ne déçoit pas ; aujourd’hui et demain sont des jours d’espérance.
L’espérance est un peu comme le levain, qui fait dilater l’âme ; il y a des moments difficiles dans la vie, mais avec l’espérance, l’âme avance et regarde ce qui nous attend. Aujourd’hui est un jour d’espérance. Nos frères et sœurs sont en présence de Dieu et nous aussi nous serons là, par pure grâce du Seigneur, si nous marchons sur la voie de Jésus. L’apôtre Jean conclut : « Celui qui a en lui cette espérance, se purifie lui-même » (v. 3). L’espérance aussi nous purifie, nous rend plus légers ; cette purification dans l’espérance en Jésus Christ nous fait marcher en hâte, promptement. Dans cet avant-coucher de soleil d’aujourd’hui, chacun de nous peut penser au crépuscule de sa vie : « Comment sera mon crépuscule ? ». Nous aurons tous un crépuscule, tous ! Est-ce que je le regarde avec espérance ? Est-ce que je le regarde avec cette joie d’être accueilli par le Seigneur ? Voilà une pensée chrétienne qui nous donne la paix.
C’est aujourd’hui un jour de joie, mais d’une joie sereine, tranquille, de la joie de la paix. Pensons au crépuscule de tant de nos frères et sœurs qui nous ont précédés, pensons à notre crépuscule, lorsqu’il viendra. Et pensons à notre cœur et demandons-nous : « Où mon cœur est-il ancré ? ». S’il n’est pas bien ancré, ancrons-le là, sur ce rivage, en sachant que l’espérance ne déçoit pas, parce que le Seigneur Jésus ne déçoit pas.
***
Je voudrais aussi prier de manière particulière pour ces frères et sœurs qui sont morts ces jours-ci alors qu’ils cherchaient une libération, une vie plus digne. Nous avons vu les photos, la cruauté du désert, nous avons vu la mer où beaucoup se sont noyés. Prions pour eux. Et prions aussi pour ceux qui ont été sauvés, et qui se trouvent en ce moment entassés dans de nombreux lieux d’accueil, en espérant que les démarches juridiques s’accélèrent pour pourvoir partir ailleurs, dans d’autres centres d’accueil plus confortables.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire